Publié
Je me suis souvent fait la réflexion : les humeurs de la famille sont souvent calquées sur les miennes. Mes enfants sont nerveux lorsque je ne suis pas bien dans mes baskets. Si je stresse, tout le monde semble stresser de concert. Je ne le vivais pas bien, plutôt comme une charge quand j’ai finalement compris la magie de ce rôle : je suis le baromètre de ma famille. Je ne veux pas jongler avec des jeux de mots et dire que nous, mamans, faisons la pluie et le beau temps chez nous (vision bien trop autoritaire) mais il est vrai qu’on donne le tempo et que l’on influence considérablement l’ambiance familiale. Attention, pour toutes celles qui souhaiteraient défendre leurs maris ; je ne dis pas que les hommes n’ont pas d’impact, loin de là mais il n’a pas la même force.
Mes émotions de femme, d’épouse, de fille, de collègue, de maman rejaillissent continuellement sur mes enfants. Quand je suis de bonne humeur, tout semble plus fluide, plus facile. Lorsque je suis agacée par quelque chose qui n’a rien à voir avec la maison, les choses sont plus dures, je suis plus irascible et personne ne passe un bon moment. Si je suis distraite ou préoccupée par autre chose, je le ressens dans le comportement de mes enfants qui pour rétablir l’équilibre de la balance semblent en demander bien davantage que d’habitude.
Au début, j’ai trouvé cette place vraiment ingrate et injuste. J’avais le sentiment qu’on ne me passait rien. Je n’ai pas un contrôle total de mes émotions comme toutes ces mamans parfaites qui semblent toujours d’humeur égale. Et je me disais qu’il est très dur de ne pas pouvoir se laisser aller, de ne pas pouvoir laisser libre cours à ce qu’on ressent. Il est déjà assez dur de mesurer ses paroles et son ton de voix, mais nos enfants sont des éponges de nos émotions de mamans. Je trouve toujours cela dur. Ça requiert un grand contrôle de soi mais je reconnais que l’impact est direct.
Puis, quand je lâchais la bride de mes émotions, je me sentais très coupable. Je m’en voulais de leur véhiculer mon stress, mon énervement engrangé au cours de la journée. Je m’en voulais de m’agacer pour rien, sans raison contre eux ou contre mon mari. Et je rentrais alors dans un cercle vicieux où ma colère génère la colère des autres et où je suis encore plus frustrée de n’être pas entendue et de récolter plus de colère, bref le chaos complet. Un peu comme la colère d’un petit enfant qui ne maîtrise pas ses émotions et ne reçoit pas la bonne réponse à sa crise.
Alors je me mets sur pause, je respire et je me rappelle que je suis un baromètre. Pas pour me rappeler à mes responsabilités (parfois un peu écrasantes) mais pour me rappeler la beauté de cette mission de maman et son aura.
Un jour, j’ai compris que tous ces constats marchaient dans les deux sens. Je suis aussi à l’origine de la bonne humeur ambiante, d’une forme d’apaisement, de tranquillité. Je suis celle qui peut faire démarrer correctement une journée, par du calme pour ceux qui en ont besoin et de la joie pour les autres. Je peux en voir les effets directs bénéfiques sur mes enfants et sur mon mari. Par exemple, j’ai la patate le matin depuis que je suis petite, c’est dans ma nature. Et bien croyez-le ou non, j’ai des enfants dont certains ont du mal à se lever mais une fois que c’est fait et qu’on a respecté gaiement une série de petits rituels, ils sont joyeux de commencer leur journée. Je suis celle qui laisse le champ libre aux émotions des autres, qui les collecte et essaie de les apaiser. Je suis celle qui peut enseigner la joie dans toutes les petites actions du quotidien, qui peut faire d’un succès un exploit et d’un drame une simple déception. Je peux aider mes enfants à vivre une enfance sereine dans laquelle ils ont la place de s’épanouir. Je peux faire de mon foyer un lieu heureux et gai.
C’est une charge par moments et une vraie responsabilité de chaque instant. Mais c’est aussi magnifique de constater qu’instinctivement, nos enfants se règlent sur notre tempo et nos affects, c’est un constat mystérieux, quasi mystique. C’est ma place naturelle, je l’accepte et essaie, quand c’est trop lourd, de m’en rappeler la beauté !
Paola
photo Clarisse de Lauriston & Maman Vogue