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Assumer vouloir s’occuper de son foyer : Un jour au bureau, une journée qui ressemble totalement aux autres. Je suis arrivée à 7h, j’ai rendu mes livrables à temps, j’ai assuré les réunions planifiées et il est 18h, je fais mon sac quand mon patron m’appelle. Mon sang ne fait qu’un tour et je m’entends dire « Pour combien de temps en avons-nous ? ». Excédé, il balaie la question et j’enfonce le clou « ma nounou part dans ¾ d’heure, je dois rentrer récupérer mes enfants ». Je remporte le morceau et cours chez moi gonflée de culpabilité. Aucun email ou sms ne tombera au cours de la soirée, l’urgence semble donc pouvoir attendre.
Le lendemain, je croise mon patron qui me propose que le cabinet rembourse la baby-sitter qui pourrait prendre le relais de ma nounou pour me permettre de rester le soir et « alléger mes contraintes ». Généreux diront certains ; certes… mais comment lui dire que j’ai envie de cette « contrainte » ? Alors je l’ai simplement dit « Oh mais tu sais, moi j’aime bien m’occuper un peu de mes enfants quand même et dans la mesure où mon travail est fait, je crois que je peux me permettre de leur donner leurs bains moi-même » Et j’ai bien vu dans son regard l’éclat d’intérêt qui s’éteint… « Elle préfère donner les bains, elle est perdue… »
Me viennent plusieurs réactions : Pourquoi devoir choisir entre 2 stéréotypes : la working woman successful qui fuit son chez soi et sacrifie sa vie de famille consciemment ou non, et la mère de famille intellectuellement en régression ? Depuis quand est-il devenu avilissant d’aimer s’occuper de son foyer ? Pourquoi est-il si difficile d’assumer quelque chose d’aussi naturel que de vouloir prendre soin des siens ?
Partiellement depuis que l’héritage féministe nous laisse à penser que les femmes devraient ressembler au maximum aux hommes pour exister dans la société économique. A force de vanter les mérites des crèches d’entreprise qui ferment à 20h, des traceurs GPS à glisser dans les sacs de nos enfants et de la formidable organisation déléguée à des batteries de nounous et autres baby-sitter : le modèle de la mère gestionnaire s’impose à tous et à toutes. Une mère masculinisée qui « gère » ses enfants comme un tableur excel. Je ne fustige pas ce modèle, il a ses forces mais le simple fait qu’il soit devenu un idéal à atteindre est un déséquilibre. Ça y est, je suis une femme aboutie parce que mon patron m’a proposé de me payer une baby-sitter.
Il serait de bon ton de vanter aussi les mérites des femmes qui dédient leurs vies à l’éducation de leurs enfants, pour en faire des hommes et des femmes du monde et construire la société de demain. Et pourquoi pas faire preuve d’un peu de nuance et chanter les louanges des femmes qui font plusieurs choses à la fois. Rappeler aux femmes que rien ne leur est impossible et que seul leur cœur doit les guider vers ce qui est bon pour elles, individuellement.
De grâce, ne me rangez pas dans la case « idiote » parce que j’ai osé dire que j’aime chanter du Henri Dès avec mes fils ; Henri Dès n’est pas incompatible avec la lecture d’un compte de résultat. Par pitié, laissez les femmes montrer ce qu’elles ont dans le ventre dans tous les domaines, en valorisant leurs qualités plutôt qu’en cherchant à les enfermer dans des boîtes préfabriquées et pré-pensées par une société masculine.
Non les frontières entre les sexes n’ont pas disparu ; non, nous ne sommes pas identiques en tout et nous ne cherchons pas à ressembler aux hommes en tout. Nous voulons juste les mêmes droits pour les mêmes devoirs. Nous voulons aussi exister dans notre genre tout comme les hommes existent dans le leur. Et la féminité passe aussi par une certaine dose de don de soi qui s’exprime notamment dans la maternité. L’égalité parfaite entre les sexes est une chimère car il n’y a pas d’égalité de nature. Nous sommes différents par essence et devrions bâtir sur ce qui nous éloigne plutôt que nous opposer. Arrêtons d’imposer aux femmes des modèles masculinisés sous prétexte que ce sont les seuls que la société sait gérer. Chaque homme est singulier, chaque femme l’est tout autant ; les complémentarités sont riches ; les modèles rigides sont destructeurs.
Je ne vais pas continuer à m’excuser d’avoir bouclé mes dossiers à une heure qui me permette AUSSI de profiter de mes enfants. Je ne vais pas cacher que j’aime passer du temps avec eux. Et je ne vais pas non plus laisser tomber mon travail car il me rend heureuse.
Chers patrons, chers maris, chers ami(e)s, chers parents, chers collègues, respectez moi un peu en tant que femme. Permettez que la vie que je mène ne colle pas à vos idées reçues mais qu’elle remplisse néanmoins les objectifs que je et vous m’avez fixés. Respectez que je puisse être plurielle sans pénaliser une mission plutôt que l’autre. Laissez-moi être moi-même et vous verrez que vous ne serez pas déçus du résultat.
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