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Vivre un deuil périnatal : témoignages de mamanges

 
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Deuil périnatal : « Mon unique crainte est qu’on ne sache pas que ma fille, Lucie, a vécu, et qu’on l’oublie » , confie Juliette, 31 ans, suite au décès de son quatrième enfant mort-né en juillet dernier. Car aujourd’hui encore le deuil périnatal est un sujet tabou. « Je regrette que la plupart des gens de mon entourage évitent le sujet, souvent par peur de blesser. J’aime parler de ma grossesse et de mon bébé ». Laissons la parole à ces « mamanges » (mamans d’anges) trop souvent incomprises… Que souhaitent-elles partager ?

Deuil périnatal : une grossesse particulière

Des signes alarmants

Généralement, la nouvelle tombe à l’échographie morphologique, au cinquième mois de grossesse. Une malformation cardiaque ou cérébrale, une trisomie 18… Les raisons sont multiples, mais l’issue est certaine. Et le corps médical ne prend pas toujours des pincettes pour l’annoncer… Oubliant qu’il a déjà face à lui des parents plein d’espoir. « Il y a une tendance médicale à ignorer l’amour de la mère et du père pour leur futur bébé », souligne Marion Petit, mère de Balthazar mort à 22 semaines de grossesse, et auteur du livre Naissance d’une mère. Juliette quant à elle se souvient : « Le médecin échographiste m’a dit que Lucie avait une grave cardiopathie et qu’elle possédait une anasarque, c’est-à-dire un œdème généralisé dû à une décompensation cardiaque. Autrement dit, son cœur était mal formé et allait s’arrêter. Mon bébé allait mourir et ça pouvait prendre quelques jours comme plusieurs semaines… »

Des moments précieux

La question de l’IMG balayée, Juliette décide de profiter pleinement de sa fille. In utero. « Je sentais Lucie bouger et j’attendais avec impatience de la serrer dans mes bras. Je l’aimais déjà. Elle devait vivre sa petite vie paisiblement et dans la joie. Alors j’ai vécu une belle grossesse, empreinte de joies merveilleuses dès que je sentais un petit coup timide dans mon ventre ou que je dansais sur de la musique enfantine avec mes trois autres enfants. Lucie répondait toujours aux caresses de ses frères et sœurs, c’était magnifique ! »

L’haptonomie

Marion confie : « Nous avons choisi l’haptonomie pour nous mettre à l’écoute de notre bébé. Cette méthode nous a aidés à prendre conscience de mon rôle essentiel en tant que future maman ». Véronique, mamange d’une petite Joséphine, découvre une façon de communiquer avec elle : « Lorsque nous avons appris que notre fille était atteinte de trisomie 18 et avait une espérance de vie très courte, nous avons décidé de profiter de chaque instant pour mieux la connaître. Je l’appelais et elle se déplaçait dans mon ventre. L’haptonomie a été une source de joie qui nous a permis de tisser un lien fort tous les trois sous le regard bienveillant de la sage-femme ».

Une rencontre et un adieu

Un deuil préparé

« Un dimanche soir, raconte Juliette, j’ai eu un mauvais pressentiment. Je me sentais « vide » et terriblement triste. En allant me coucher ce soir-là, j’étais inconsolable. Je sentais que quelque chose n’allait pas, mais je ne pouvais pas dire quoi. Le lendemain, lorsque ma sage-femme a voulu contrôler le rythme cardiaque du bébé : rien. Pas un bruit ! Je me suis donc rendue à la maternité où le gynécologue m’a annoncé froidement : « C’est bien ce que je pensais, le cœur ne bat plus et il n’y a presque plus de liquide ». De là, les événements se sont enchaînés à une vitesse vertigineuse. L’accouchement a été programmé deux jours après. La sage-femme qui m’attendait pour le déclenchement a été géniale. Elle était très professionnelle, mais aussi très chaleureuse. Elle a su être disponible quand j’en avais besoin sans imposer sa présence ou dramatiser l’événement. L’accouchement s’est bien passé et j’ai été heureuse de prendre ma fille dans les bras. Nous avons choisi de la prénommer Lucie Marie Espérance ».

Un deuil inattendu

Pour Maÿlis, tout s’enchaîne très vite sans la moindre préparation psychologique. Un mois avant le terme, elle accouche d’une petite fille, Isaure, qui s’avère être atteinte de trisomie 18. Et qui meurt dans la journée. « Ignorant les malformations de mon bébé, je suis arrivée confiante à l’accouchement. J’aime me dire que notre fille a voulu nous protéger d’une grossesse stressante. Lorsque les médecins ont compris qu’il n’y avait rien à faire, à part laisser la nature « opérer », je l’ai longuement câlinée en peau à peau et ai pu lui dire tout mon amour. Ces quelques heures passées avec elles ont été un moment intense de tendresse. »

Hélène, trois fois mamange, connaît la même situation : « Ma première grossesse s’était bien déroulée, mais deux semaines avant le terme, je présentais tous les symptômes de pré-éclampsie. Du coup, j’ai été déclenchée. Durant le travail, sans raison évidente, notre bébé est mort. Nous commencions notre vie de parents d’une manière très particulière, sans doute la plus difficile qu’il soit. La perte de notre tout-petit a été une immense épreuve, très douloureuse. »

Rentrer les bras vides

Après l’accouchement, une autre épreuve attend les mamanges : le retour à la maison sans bébé. Marion écrit : « J’ai passé la porte de la maternité, le ventre vide de toi. La violence du temps qui passe trop vite, la solitude des nuits froides sans tes petits cris de nouveau-né. Nous ne verrons plus ton corps. J’ai l’impression de ne t’avoir jamais assez dit au revoir, mon petit trésor. » Maÿlis confie : « Il a été difficile de rentrer sans nourrisson. J’ai dû raconter plus de vingt fois la même histoire, mais cela ancre Isaure dans la vie et dans la mémoire. Cela me fait du bien ! »

La reconnaissance d’une vie

Le regard de l’autre

« Vous êtes jeunes, vous en aurez d’autres ». « Ce n’est pas comme si vous le connaissiez, du coup, c’est moins douloureux ». Hélène entend encore résonner ces paroles maladroites : « Nous étions jeunes et la plupart de nos amis n’ont pas vraiment saisi ce que nous vivions. Si nous avons eu du soutien, nous avons aussi entendu toute sorte de réflexions, qui nous ont blessés, comme si on voulait banaliser le deuil de notre aîné que nous n’avions pas eu la chance de connaître« . Marion lui fait écho : « Nous serons peu nombreux à te rencontrer. Les autres penseront qu’il ne s’est rien passé, que tu n’existes pas. » Et  pourtant…

Un manque physique

Juliette raconte : « Certains jours sont lourds et je me sens très triste, car sa présence physique me manque. J’aimerais l’embrasser et la toucher. Mais je sais qu’elle est au Ciel et nous communiquons toutes les deux par la prière. Dans ces moments-là, je sens sa présence et je lui dis comme je l’aime. » Maÿlis se souvient avec émotion : « Un mois après l’accouchement, au moment de mon gâteau d’anniversaire, on a tous fondu en larmes. On a pris conscience de combien elle nous manquait, de combien elle faisait partie de la famille dans son invisible présence… Mais la vie continue et elle est belle ! »

L’inscription à l’état civil

Lucie, Balthazar, Isaure, Joséphine… Toutes ces mamanges ont souhaité donner un prénom à leur enfant disparu trop tôt. En France, à partir de 15 SA, il est désormais possible d’inscrire son bébé à l’état civil et de lui faire des obsèques. Cette place sur le livret de famille sonne comme une reconnaissance officielle. « La vie de Joséphine fut courte et cachée, mais bien réelle parmi nous », souligne Véronique. Le travail de deuil peut alors commencer…

Un cheminement intérieur

Chercher du sens pour continuer d’avancer

« Pourquoi nous ? » Cette question se heurte au silence. Parler est la meilleure façon de panser ses plaies. Le temps fait le reste. Maÿlis précise : « Revivre ce qui s’est passé, c’est aussi donner du sens. La grâce de la souffrance, c’est de pouvoir mieux comprendre ceux qui ont souffert et qui souffrent. C’est, me semble-t-il, le meilleur chemin de croissance intérieure, même si je sens que j’en suis seulement au tout début… » Pour Hélène, qui a successivement perdu deux enfants morts nés (puis un troisième quelques années après), un changement de vie se profile alors : « Après une telle année, nous ne voulions plus d’enfants et avions le projet de vider nos comptes en banque pour nous offrir un beau voyage. Au final, un an plus tard, nous avions gardé notre argent et partions pour le Brésil en mission humanitaire auprès d’enfants défavorisés. Nos deux petits nous avaient sans doute éclairés.

Leur amour nous a permis de voir que cette paternité et maternité, que nous n’avions pu exercer auprès d’eux, n’étaient pas perdues et pouvaient être données. Nos bras vides de parents ont été vraiment comblés durant ces deux années de mission. Comblés d’une manière inattendue et imprévue certes ! Quel cadeau d’avoir pu vivre une fécondité si différente de la fécondité « classique » et pourtant toute aussi belle. »

Une autre grossesse ?

Une fois les blessures cicatrisées, de nouveaux projets fleurissent. Juliette confie : « J’espère pouvoir accueillir un autre enfant dans notre foyer ». Maÿlis admet : « Le fait d’avoir eu une autre petite fille un an après m’a évidemment permis de compléter le deuil. Je me suis sentie très gâtée ! » Quant à Hélène, une merveilleuse nouvelle est arrivée : « Nous sommes revenus de mission avec un troisième bébé ! C’était médicalement de la folie, car je devais être suivie avec un traitement d’essai et avais vécu cette grossesse dans la pampa brésilienne avec un suivi peu adapté. Je suis rentrée en France à six mois et demi de grossesse pour y être hospitalisée et après quinze jours de nombreux examens, notre petit bonhomme est né prématuré, mais VIVANT ! C’était une sacrée joie ! Malgré le stress de tout ce qui entoure la prématurité, je me souviens que nous étions les parents joyeux de la néonatalogie… On était si heureux que notre bébé vive que nous étions prêts à bien des sacrifices ! »

Pour aller plus loin :

  • Je suis Zélie, une petite fille pas comme les autres d’Armelle Boyer, magnifique livre dans lequel l’auteur se place du point de vue de Zélie, bébé atteint de trisomie 18 (maladie qui conduit inévitablement à un deuil périnatal) et qui raconte le parcours de ses parents durant cette grossesse particulière.
  • Je n’ai pas dit au revoir à mon bébé de la pédiatre Catherine Radet qui évoque avec délicatesse la souffrance du deuil périnatal /anténatal. A retrouver sur le site de la Fnac !
  • Naissance d’une mère de Marion Petit, témoignage sur le deuil périnatal qui propose la biogénéalogie pour donner du sens à cette épreuve.

Laetitia d’Hérouville

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