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« Mais il le sait pourtant qu’il n’a pas le droit de taper sa sœur »
« On lui a pourtant expliqué des dizaines de fois que ce n’est pas pour l’embêter qu’on lui demande ça »
« Mais je ne comprends pas, il réfléchit pourtant, et on lui explique mais non, ça ne rentre pas ! »
Vous aussi vous avez déjà prononcé ces phrases ? Vous vous sentez concernée ?
C’est normal.
Il faut comprendre une chose essentielle dans le développement psychique humain.
Le canal de la pulsion, celui qui nous anime celui qui nous rend dynamique, est très différent du canal de la raison. Il n’y en n’a pas un mieux que l’autre, ils sont tout simplement différents. C’est ce qui fait, par exemple, que même si nous savons que ce n’est pas bon pour notre santé, nous mangeons du chocolat après le repas, ou nous fumons même si sur nos paquets les images sont horribles et que nous connaissons tous quelqu’un malade après avoir fumé toute sa vie.
Lorsqu’il s’agit d’intégrer des règles, et de comprendre des interdits, il existe deux phases : la première phase qui consiste à comprendre et enregistrer l’interdit. Lorsque l’enfant grandit, et qu’il commence à aller explorer le monde grâce à ses nouveaux progrès moteurs, il tâtonne et ne connait pas vraiment les limites de l’espace, ne maîtrise pas les règles de vie et de sécurité.
Ainsi, l’enfant a besoin qu’on vienne lui expliquer ces limites :
« Tu ne peux pas toucher aux boutons du four parce que si tu allumes le four cela va devenir très chaud et tu peux te faire très mal ! »
« Bouger dans tous les sens sur la table à langer est dangereux, tu risques de tomber et de te faire très mal alors reste plutôt allongé encore quelques minutes ! »
« Jeter l’assiette par terre est interdit, ce qu’il y a dans ton assiette, c’est pour que tu déjeunes »
Si votre enfant est dans cette période, vous allez lui répéter de nombreuses fois ces règles et le sens de ces règles. Parfois, certaines règles vont s’intégrer de cette manière-là, par l’explication, et l’enfant agira en fonction. Mais parfois, maitriser l’information intellectuellement ne suffira plus et votre enfant aura besoin de vivre l’éprouvé de la frustration pour intégrer ces règles. Il aura besoin de vivre, par l’expérience, le fait que quand on n’écoute pas, on se met en danger, donc on risque une sanction avant de se faire mal.
En effet, il est inutile d’attendre que l’expérience passe par la douleur (brulure, coince le doigts…) pour que l’enfant l’intègre. Il n’a certainement pas besoin qu’on le morde pour qu’il vive l’épreuve de la douleur et de l’humiliation par la morsure, il n’a pas besoin d’être tapé par sa sœur pour ne plus avoir envie de le refaire, et il n’a pas besoin de tomber de sa chaise haute pour intégrer le fait qu’il ne faut pas se lever tout seul.
C’est ainsi que l’apprentissage des règles, l’acceptation de la frustration ne s’effectue pas uniquement par l’intégration intellectuelle des règles. L’élan vital, l’envie de découvrir le monde et d’en connaitre ses limites a quelque chose de plus fort que tout !
Ainsi, ne vous étonnez pas d’avoir l’impression de toujours répéter les choses, les consignes dans le vide, puisque si nous, adultes avons aussi parfois du mal à être alignés entre ce que nous savons de bien et de mal et ce que nous faisons, vous imaginez bien que les enfants vivent les choses encore moins facilement !
On peut expliquer, un peu, au début, puis très peu ensuite, au moment de la transgression de la règle. Pourquoi ?
Trop de parents s’essoufflent encore à essayer d’expliquer constamment le monde, mais leur relation avec leur enfant s’abîme ! Il est préférable d’accepter que l’enfant prenne quelque temps pour vivre sa frustration et d’expliquer ensuite plutôt que d’expliquer à tout prix à l’instant T.
Lenaïg Steffens