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Je ne suis pas allée à l'école jusqu'à mes douze ans…

 
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Un parcours atypique et sans école : Oser être soi-même

« De ma naissance à mes presque douze ans, je ne suis pas allée à l’école. Pas un pied, pas un orteil. Pas une once de moi-même n’avait mis un pied dans une salle de classe.

J’ai beaucoup déménagé, de ferme en maison, de maison en appartement, d’appartement en maison… et tout ce temps je suis restée non-sco. Avec environ deux heures de travail quotidien avec ma mère, j’en apprenais autant, voire plus que les enfants scolarisés. Durant mon immense temps libre, je lisais, dessinais, me rendais à diverses activités (sport, musique, arts plastiques…).

Nous faisions partie d’une association d’autres familles pratiquant la non-sco, où je pouvais donc rencontrer des enfants de tous âges, jouer avec eux, et m’ouvrir l’esprit. Rencontrer l’autre.

Mon enfance a été pleine de découvertes, de culture, lecture, musées, nature…

C’était parfois compliqué d’expliquer aux enfants scolarisés que je n’allais pas à l’école, pourquoi, et comment j’apprenais des choses. Il y avait souvent un petit décalage, et aussi de l’incompréhension.

Pour moi, la non-sco a été la phase la plus formatrice de ma vie, et celle qui m’a le plus apporté, de tous les points de vue. Elle m’a permis de grandir, d’évoluer et de m’instruire dans un cadre souple, ouvert et non-violent. Un cadre où l’on respectait mon rythme naturel, mes envies, ma personne tout entière.

J’ai grandi dans un milieu et avec des personnes qui n’étaient ni âgistes, ni racistes, ni sexistes, ni quoi que ce soit d’autre qui aurait pu affecter négativement ma personnalité.

J’ai donc pu me construire et évoluer selon ma propre personnalité, quasiment sans entraves. J’ai pu m’exprimer, apprendre les choses que je voulais apprendre, créer, lire, en toute liberté.

En 2011, pour des raisons diverses, je suis entrée au collège. En 5e.

Devoir se fondre dans un moule

Ça a été un des plus gros chocs de ma vie. Un monde d’intolérance, de moqueries et de haine se déployait devant moi, me faisant à tout moment sentir que j’étais différente, bizarre, pas normale.

Me faisant sentir que je n’étais pas à ma place, et que si je voulais l’être, je me devais de changer. Je devais être quelqu’un d’autre, ou du moins paraître. Moqueries, incompréhension, décalage, mal-être. On ne me prenait pas au sérieux, ou rarement.

Durant mes années de collège, je ne me suis jamais ou très rarement, fugacement, sentie à ma place. Je n’aimais pas les mêmes choses que les autres, je ne m’habillais pas pareil, n’avais pas les mêmes références, ne m’intéressais pas aux mêmes choses, et pour cela on me trouvait bizarre. J’étais la hippie de la classe, dans le mauvais sens du terme.

En 3e, j’ai commencé à rentrer doucement, imperceptiblement, dans ce moule ; à me fondre dans ce carcan. À me  »normaliser ». À adopter les mêmes us et coutumes que mes congénères scolarisés depuis leur plus tendre enfance. J’ai commencé, sans l’accepter, à m’adapter au milieu scolaire, que je qualifiais – et que je qualifie toujours – au plus profond de moi-même, de carcéral.

Arrivée au lycée, j’ai retrouvé une amie d’enfance, elle aussi ex-non-sco.

Ce fut une bouffée d’oxygène, l’électrochoc qui me fit tout remettre en question. Qui me fit prendre conscience que ce que je devenais n’était pas moi, et que je devais remettre en question tout ce que j’étais en train d’assimiler et d’intégrer malgré moi. D’un coup, je remettais tout en question, je me révoltais contre tout, et m’arrachais peu à peu aux sables mouvants qui avaient commencé à m’engloutir. Cette amie a été pour moi la perche me permettant de sortir du gouffre de la conformité dans lequel j’étais en train de sombrer sans m’en rendre compte.

Je ne dis pas qu’être conforme aux attentes de la société n’est pas une bonne chose, du moment qu’elle est consciente et souhaitée. Ce qui n’était pas le cas pour moi.

Un système fait de normes et de codes

Je haïssais ce système, cette société de normes rigides et de codes pour moi absurdes.

Je haïssais ce système intolérant et irrespectueux, que cela soit de l’humain, de la nature, de la vie en général. Je haïssais ce système qui avait failli me rendre étrangère à moi-même et à mon être profond.

En parallèle, je supportais de moins en moins l’école et ses contraintes, ce rapport de force malsain entre adultes et enfants, cette injustice et cet irrespect qui nous étaient infligés sous prétexte que nous étions plus jeunes. Je ne supportais plus l’inertie des autres. Cette incapacité à penser par eux-mêmes, cette incapacité à vivre la vie pleinement, cette incapacité à remettre en question le moule dans lequel ils étaient coulés depuis la naissance. Je ne supportais plus l’obligation d’apprendre à la pelle des choses inutiles, sans aucune possibilité de s’exprimer, de faire entendre ses idées et sa voix, de penser par soi-même.

Je décidai de me révolter. De ne pas accepter. De refuser l’embrigadement de mon esprit et de ma personne.

J’étais une flamme que l’on voulait éteindre, peu à peu. J’étais au bord de l’extinction, et tout d’un coup, je décidai de lutter, et de me ré-enflammer, au moins par la pensée.

Le mal-être s’accentuait, ou du moins, il était différent. J’étais en décalage de par mes idées, mes opinions, ma rage contre le système. De par ma personne tout entière.

La prison qu’était pour moi l’école me rendait littéralement malade. Je ne la supportais plus.

Je ne voulais plus y aller. Je ne voulais plus que l’on me vole ma vie et que l’on me considère comme inférieure à cause de mon jeune âge.

Mes idéaux de plus en plus forts et de plus en plus ancrés en moi, l’importance que j’accordais à l’éthique, à la liberté, à l’honnêteté envers soi-même, à l’égalité et au respect entre tous les humains m’interdisait de supporter ce milieu qui me consumait.

J’imaginais une société autre, un monde autre. Je voulais m’enfuir, courir loin, très loin et rallumer irrévocablement la flamme que le système tentait d’éteindre.

En première, je décidai de ne pas faire ma terminale au lycée. Je supportais l’année avec comme lumière au bout du tunnel le fait que l’année suivante cela serait fini. Que je ne remettrais plus les pieds en milieu hostile et que je redeviendrais l’unique propriétaire de mon existence.

Une nouvelle perspective

En septembre 2016, je commençai ma terminale au CNED.

Ce fut une libération. Même si je devais tout de même ingurgiter une quantité effrayante de connaissances abstraites et inutiles pour ma vie future, je le vivais mieux. Je pouvais enfin aller à mon rythme. Ne pas consacrer plus de temps qu’il n’en fallait à des choses qui n’en valaient pas la peine. Je (re)découvrais la liberté.

Malgré un stress important pendant ma préparation du bac, cette année de cours à distance fut la meilleure que je passais depuis longtemps. Entre manifs, livres, Maroc et musées, j’étais enfin moi-même. Le système me révoltait toujours autant, mais il n’exerçait plus de pression directe, continue et rapprochée sur moi-même, ce qui me le rendait plus supportable au quotidien.

Aujourd’hui, à dix-sept ans et un bac L en poche, je suis sur les bancs de la fac où j’apprends enfin des choses qui m’intéressent, sans pression autre que mon désir d’apprendre.

La non-sco m’a énormément aidée : à grandir et mûrir, à m’instruire, et a laissé des traces dans ma personnalité qui ne partiront certainement jamais. Elle m’a aussi permis de développer une relation privilégiée avec ma mère.

C’est grâce à cette éducation sans école que je suis aujourd’hui la personne que je suis. »

Credit photo : ©Pinterest

Isa LISE

Blogueuse, Autrice de guides pédagogiques (« Faire l’école à la maison »), Conceptrice de Kits pédagogiques et Maman de deux filles extraordinaires

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