Publié
« L’avenir nous tourmente, le passé nous retient, c’est pour cela que le présent nous échappe. » Gustave Flaubert.
Il y a des dates qui font vieillir plus sûrement qu’un anniversaire, et le dernier jour de l’année scolaire en fait indéniablement partie.
Même si on les attend toute l’année, et que l’attrait de la plage et des maillots est bien là, à l’approche des vacances d’été, il faut reconnaître que l’on ralentirait bien le temps pour ne pas voir arriver l’ultime vendredi…
ll n’est pas si facile de quitter un rythme bien installé (même épuisant), et les vacances
apportent avec elles leur lot d’incertitudes. Après une année de stabilité savamment étudiée en septembre (la fameuse maîtrise du Tetris si propre aux femmes), c’est alourdies des cahiers de
l’année, cadeaux des collègues ou sacs de change de la crèche que nos pensées font désormais
le bilan des mois écoulés et de ce que va se passer, MAINTENANT.
Il y a ceux qui partent en vacances les premiers, ceux qui déménagent, et ceux qui restent. Et
quitter ou voir partir ceux que l’on aime n’est pas une chose aisée… L’on attache beaucoup
d’importance aux angoisses de séparation des tout-petits, mais n’en est-il pas de même pour
les grands enfants que nous sommes?
Il y a tous ces gens que l’on reverra, quoi qu’il arrive, et même si cela doit se produire
dans seulement trois mois, six mois ou un an, le wagon sera raccroché aussi rapidement qu’il
s’est éloigné…
Il y a ceux envers qui l’on craint de ne pas être à la hauteur, à l’heure du tout numérique, et avec qui l’on redoute de ne pas, ou mal, rester en contact.
Et il y a ceux que l’on ne reverra pas, et auxquels l’on s’était attaché bien plus que l’on ne voudra jamais l’admettre: la maîtresse {Celle dont les habitudes ou méthodes nous faisaient pester}, la nourrice {qui portait des sandales en plastique et un accent polonais}, la voisine {si bavarde}, cette dame de
la crèche qui passait toujours le balai en souriant au moment où l’on enfilait nos surchaussures
{Comment il va, le Victor, ce matin?}, et même la boulangère, qui donnait une chouquettes
à nos ingrats d’enfants {Chéri, dis merci à la dame !}.
Si nous appréhendons de les quitter, les revoir une dernière fois nous serre véritablement le cœur.
Une vie se termine pour nous, des relations s’arrêtent, mais heureusement, nos enfants,
eux, attendent impatiemment LA SUITE (eux qui ne connaissent pas le mode pause, celui que
chaque parent voudrait pouvoir actionner à l’envi!), et c’est pour eux, avec eux, que l’on
relèvera la tête, remplira les bagages, chargera la voiture, rencontrera de nouvelles personnes,
tissera de nouvelles relations, et que l’on rencontrera un nouveau maître, une nouvelle
nounou. Catherine fera place à Nathalie, et nos nouveaux voisins seront finalement tout aussi
merveilleux. L’on trouvera même certains aspects de notre vie plus confortables dans celle-ci
que dans celle d’avant, que l’on laissera peu à peu derrière nous…
Nous serons plus riches de nouveaux amis, de nouvelles expériences, et les anciennes
resteront cependant dans notre mémoire comme des épisodes heureux car l’homme à la
fabuleuse faculté de se souvenir de ce qui l’a fait grandir pour atténuer ce qui l’a fragilisé. Et c’est bien chacune de ces journées, avec leurs particularités, leurs émotions, qui
s’additionneront pour former un récit de vie. Notre récit. Qui s’écrit par devers nous, mais qu’il
ne tient qu’à nous d’embellir. Et il est des romans si passionnants que l’on voudrait ne jamais
refermer…
Maëlle Margail
© Clarisse de Lauriston