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Nombreux sont les articles, les témoignages autour de ce sujet très vaste et d’actualité qu’est le burn out parental. Beaucoup de choses se rencontrent et se mêlent autour de ce sujet, des ressentis subjectifs mais également des observations plus générales, objectives. Cette problématique est multifactorielle et chaque situation est unique puisqu’elle mobilise les parents, leur représentation de la parentalité, le couple, les désirs profonds de chaque membre du couple et les blessures des parents.
Petit tour d’horizon pour faire le point sur ce phénomène encore peu connu.
Il est évident que, même si le « moteur » des symptôme du burn out se trouvent à l’intérieur de soi, la réalité compte aussi et force est de constater que les enfants difficiles, avec qui les parents se trouvent en conflit du matin au soir pèsent beaucoup sur l’humeur des parents, leur état psychique et leur estime d’eux même. En effet, de nombreux parents adoptent une mauvaise image d’eux-même, se trouvant bon à rien puisqu’incapable de mener une mission pourtant simple à priori : éduquer leurs enfants. C’est en réalité tout sauf simple et demande non seulement l’application d’un certain nombre de techniques et une méthode précise mais aussi une forme d’apaisement avec sa propre histoire pour vivre sereinement et efficacement sa parentalité.
Il s’agit là d’une attitude que l’on observe principalement chez les mères. Elles semblent sur investies, dévouées corps et âmes à leur enfants, régissant leur vie sociale, leurs loisirs, leur développement intellectuel, s’assurant du bon ordre de la maison, de la qualité de l’alimentation et se documentent énormément pour mener à bien toutes ces missions. Ces exigences de présence et de temps entraînent souvent un isolement social important. En effet, elles sont très renseignées (via les réseaux sociaux notamment) et tentent d’appliquer des méthodes qui ne leur conviennent parfois pas vraiment. Cela entraine évidemment dans un premier temps une fatigue physique de devoir faire autant de choses puis une fatigue morale et émotionnelle d’être dévouées à ces petits êtres sans jamais faire de retour à soi et prendre du temps pour soi. Cet épuisement peut développer beaucoup de colère, d’énervement et des sentiments très ambivalents à l’égard de leurs enfants (« j’en peux plus, il m’énerve tellement »). Tout leur parait décevant, ou en tout cas moins bien que ce qu’elles avaient imaginé d’elle et de leurs enfants. Ces sentiments normaux sont vécus avec beaucoup de culpabilité de la part de ces mamans qui veulent à tout prix bien faire. Cette culpabilité s’accompagne d’une mésestime d’elle-même allant jusqu’à la dépression (« Tous les efforts fournis sur l’autel de la maternité et de la vie familiale semblent soudain vains, creux, non comblants et décevants sur le plannarcissique », Liliane Holstein, Le burn Out parental).
Aujourd’hui, plus que jamais, les enfants sont désirés, attendus, et sont depuis leur conception accompagnés par un parcours de soin. L’enfant choisi et guetté porte avec lui comme un espoir de bonheur, d’accomplissement. Comme si l’enfant « magique » allait permettre d’effacer tous les noeuds familiaux. Or, toutes celles qui ont déjà vécu les semaines après l’accouchement et les années qui s’ensuivent savent que la vie même si elle devient chargée de petits bonheurs peut aussi s’avérer plus complexe et remplie de challenges quotidiens. La désillusion arrive évidemment rapidement associée à des angoisses inhérentes à la maternité (baby blues…), ce qui accentue le phénomène d’isolement de ces mères et la détresse psychologique.
Nous observons vraiment ce phénomène de performance, voire de rentabilité de la parentalité. Est-ce que je fais bien, assez bien par rapport à telle amie, aussi bien que telle influenceuse sur Instagram, comme ma parfaite belle-mère ?
La peur de mal faire induit une pression intérieure si forte qu’elle pèse sur les enfants et a tendance à accentuer leurs difficultés de comportement et abimer la relation parent/enfant.
En lien avec ce qui est énoncé plus haut, ces mamans souvent victimes de ces motivations pourtant initialement pleine de bons sentiments et de désir de bien faire, peuvent sans le vouloir évincer le père en lui gommant un peu sa place. Les pères découvrant aussi cette fonction paternelle peuvent perdre pied. Lorsqu’ils essaient alors de reprendre leur place, il est trop tard ou le mécanisme est déjà installé depuis longtemps. De nombreuses femmes, sorties de leur burn out expliquent avec beaucoup d’humilité à quel point elles ont saboté la place de leur conjoint auprès de leurs enfants et que même lorsqu’il prenait cette place, il lui était toujours reproché quelque chose (« non mais c’est pas comme ça qu’il faut faire, bon laisse, je vais m’en occuper »), rendant le père impuissant (comme l’explique Liliane Holstein dans son ouvrage sur Le Burn Out : « Si ces tentatives d’éducation en équipe ne sont pas respectées par les femmes, si les pères ne se sentent pas investis par leur confiance, alors ils lâchent prise, baissant les bras, découragés. »).
Certains Papa ont aussi beaucoup de mal à prendre leur place et il incombe alors aux mères toute la charge mentale de la maison, aggravant ce phénomène de fatigue et d’épuisement maternel.
Leur conjointe qui se trouve dans une situation parfois très difficile ne parvient pas toujours à mettre des mots sur ce qui lui arrive et attend peut-être même de son compagnon qu’il l’aide à verbaliser les choses. Mais, l’unité de couple et parfois tellement mise à mal que l’échange émotionnel et intime n’est plus possible et ne permet pas l’apaisement. C’est alors que les hommes trouvent leur intérêt ailleurs que dans la vie de famille (amis, addictions, relation extra conjugale), et sont prêt à tout pour trouver un échappatoire à cette situation si complexe. Nous percevons bien ici le cercle vicieux dans lequel le couple est plongé, chacun cherche une place qu’il ne trouve pas et la fatigue et la réorganisation soudaine que requiert l’arrivée d’un enfant submerge tout cela.
En effet, de nombreuses mères racontent ce burn out maternel et prennent la parole mais il y a aussi énormément d’hommes qui l’expriment et il n’est pas rare de recevoir en consultation des parents qui se disent vraiment à l’unisson « à bout », « au bord du gouffre », « en train de craquer ».
Même si nous aspirons tous à un système égalitaire entre homme et femme, force est de constater que les mères passent encore davantage de temps avec leurs enfants que les pères, dans la plupart des familles. Ainsi, cette fatigue se ressent plus rapidement et avec plus d’intensité. Ce temps passé ainsi que le lien initial très fort qui unit la mère et son enfant entraine une forme d’investissement « naturel » de la part de la mère dès les débuts de la grossesse. Force est de constater que nous retrouvons surtout des mamans sur les réseaux sociaux et ce sont elles qui cherchent des réponses à leurs questions et qui interagissent avec d’autres mamans la plupart du temps.
Ces parents ressentent une fatigue importante qui ne passe pas et qui n’empêche pas la poursuite d’un investissement important, malgré le manque d’énergie, ce qui aggrave évidemment le phénomène. De l’anxiété peut également s’exprimer, des angoisses, une humeur à fleur de peau entrainant des crises de larmes récurrentes. La dévalorisation est au mieux exprimée mais en tout cas ressentie et parfois dissimulée ce qui ne permet pas la mise en place d’un réseau de soutien en conséquence. Ces symptômes là sont évidemment imperceptibles pour celui, celle ou ceux qui les vivent.
La comparaison et la recherche de perfection étant très importante, elle peuvent prendre le dessus et abîmer les liens qui ne sont plus que conflits et confrontations. De plus, l’absence de cadre proposé aux enfants les rends particulièrement intolérant à toute frustration, ce qui engendre des crises très difficiles à gérer et à l’origine d’une perte d’espoir dans des relations familiales sereines et rêvées.
La fatigue entraine un mal-être et une forme de lenteur qui empêche l’éclosion d’une parentalité efficace et sereine. En effet, élever des enfants avec tout ce que cela implique comme exigence matérielle et comme implication affective est parfois difficile pour des parents épuisés et vidés émotionnellement.
L’ambivalence affective dans laquelle nous plonge les enfants (« Ils sont insupportables ce soir, j’en peux plus ») avec parfois le besoin de prendre énormément de distance avec eux, peut, si elle n’est pas accompagnée et verbalisée engendrer des questionnements et des doutes important, entrainant des idées telles que « je n’aime pas vraiment mes enfants » ou « je ne suis pas faite pour être mère finalement ».
Il est essentiel de garder en tête que cet état d’épuisement, de burn out peut n’être qu’un passage s’il est accompagné et verbalisé. Rien n’est définitif et il faut profiter de toutes les opportunités d’échanges pour aller mieux et redevenir efficace en tant que parent. Il est indispensable d’aller trouver de l’aide pour comprendre ce qui dysfonctionne concrètement et ce qui nous bloque intérieurement pour retrouver une parentalité heureuse.
MamanVogue vous propose le Mercredi 14 Avril un Live animé par Lénaïg Steffens, autour de cette question de l’épuisement parental.
@lenaig.steffens.psy
Crédit photo : Virginie Hammon pour Maman Vogue
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