Dans un monde où la maison devient le refuge principal des enfants, au détriment des espaces extérieurs, un rapport du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) tire la sonnette d’alarme. Placée sous l’autorité de Matignon, l’instance appelle à « rendre le dehors aux enfants et aux adolescents », un enjeu essentiel pour leur développement et leur bien-être. Nous avons lu pour vous ce rapport adopté le 17 octobre 2024.
Le rapport met en lumière une tendance inquiétante : les enfants passent de moins en moins de temps à jouer ou à explorer à l’extérieur. Cette évolution est décrite comme l’émergence d’une génération d’« enfants de l’intérieur », un terme emprunté aux géographes néerlandais Lia Karsten et Willem van Vliet.
Entre la sédentarité accrue due aux écrans et des sorties limitées à des environnements encadrés, les enfants grandissent désormais entre quatre murs, souvent confinés à la maison ou dans des espaces strictement surveillés. Selon le HCFEA, 37 % des jeunes âgés de 11 à 17 ans passent au moins 4 heures et demie par jour devant un écran, une sédentarité exacerbée depuis la crise sanitaire.
Avec l’explosion des services en ligne (livraisons, e-commerce, réseaux sociaux), les sorties se raréfient, impactant aussi les enfants. La ville, de moins en moins « habitée », devient un lieu de transit plutôt qu’un espace de vie. D’ailleurs, rien n’y est fait pour les enfants qui sont onc dans un danger permanent lorsqu’ils sortent dans la rue.
Les parents, souvent inquiets pour la sécurité de leurs enfants, préfèrent les garder à la maison. La peur des accidents, des mauvaises rencontres rend de plus en plus rare les moments où les enfant sortent de chez eux. On peut aussi noter la nouvelle tendance du « bobo zéro » qui limite leur autonomie, alors même que la maison n’est pas sans risques (accidents domestiques, exposition à des contenus inappropriés). Cette nouvelle attention de vouloir protéger les enfants de tout est en effet néfaste à leur développement et leur émancipation.
Les villes privilégient les déplacements et les activités des adultes, au détriment des enfants. Circulation dense, pollution, pistes cyclables inexistantes, interdictions de jouer dans les rues ou sur les pelouses… Les enfants ne trouvent plus leur place dans ces environnements. Il suffit de voir les quelques squares de jeux installés entre deux immeubles avec des revêtements synthétiques pour comprendre à quel point les enfants ne sont pas prioritaires dans le milieu urbain. Même dans les zones rurales, leur mobilité est freinée par un manque de transports publics et une dépendance à la voiture parentale. Les parents sont alors sur-sollicités pour faire les conduites et, bien évidement, ne peuvent accéder à toutes les demandes.
Les conséquences de ce mode de vie centré sur l’intérieur sont préoccupantes :
Le rapport souligne que les jeux libres à l’extérieur sont essentiels pour que les enfants apprennent à gérer leurs émotions, à interagir avec les autres et à développer leur autonomie.
Le HCFEA met en avant plusieurs initiatives pour encourager le retour des enfants dans les espaces extérieurs :
Le Haut Conseil propose également de concevoir des espaces publics plus accueillants pour les enfants, avec des zones où ils peuvent courir, grimper, se salir ou même prendre des risques modérés, autant d’expériences essentielles à leur développement.
Si cela aboutit, il faudra néanmoins que les parents jouent eux aussi le jeu ! Qu’ils laissent leur progéniture jouer dans la boue, s’écorcher les genoux et déchirer ses vêtements.
Pour Sylviane Giampino, présidente du HCFEA, ce rapport défend bien plus que des recommandations : il porte une vision de la place de l’enfant dans la société. Il est urgent de leur redonner « la liberté de pleurer, crier, courir et s’agiter », de jouer au contact de la nature et de se reconnecter à un monde extérieur porteur d’apprentissages et de découvertes.
Laisser les enfants explorer et jouer dehors, c’est leur offrir un environnement où ils peuvent grandir pleinement, à la fois physiquement, émotionnellement et socialement. Parce qu’au fond, la liberté de jouer dehors, c’est aussi la liberté d’être un enfant.
Espérons que ce rapport fasse bouger les lignes et que les enfants retrouvent l’envie d’aller dehors pour ainsi mieux se confronter au réel. Mais n’oublions pas notre responsabilité de parents, premiers éducateurs ! A nous de montrer l’exemple à nos enfants en sortant prendre l’air, en organisant des promenades et des découvertes. Faire du sport avec eux peut-être également un bon moyen de leur redonner l’envie d’aller vers l’extérieur.
Enfin, n’oublions pas qu’être enfant, c’est avoir le droit d’aller tester les limites. Et parfois, cela passe pas une paire de baskets « crados » et un jean troué !
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