« Comment avons-nous pu nous comporter comme si elle était née pour n’être que cela : une mère ? […] Comment est-il possible qu’il ne me soit jamais venu à l’esprit qu’elle aussi avait nourri des rêves ? »
Cette phrase, issue du livre Prends soin de maman de Kyung-sook Shin, résume parfaitement une question qui m’habite depuis que je suis mère. Comment faire exister la femme que je suis dans ce que je transmets à mes enfants ? Comment, au-delà d’une éducation, leur donner également une part de moi, leur transmettre ce que j’aime et ce qui me nourrit ? Comment leur donner de me connaître ? Comment exister pour eux au-delà de la mère que je suis ?
Si on part de la définition du Robert, la maternité est « l’état d’être mère ». Un état qui, une fois notre enfant né, nous habite et ne nous quitte plus jusqu’à nos derniers jours. Un état qui peut même nous habiter avant la conception de notre enfant, qui se niche dans le désir d’enfanter. Une fois installée, la maternité s’infiltre dans chaque parcelle de notre vie, on peut difficilement la mettre à distance et elle définit beaucoup de nos actions.
D’ailleurs, lorsqu’on se balade dans les rayons d’une librairie, qu’elle soit en ligne ou matérielle, on tombe sur de nombreux ouvrages de maternité. Comment vivre sa grossesse, comment vivre un accouchement physiologique, comment prendre soin de son bébé les premiers mois et même de plus en plus d’ouvrages sur le post-partum, ce qui est une très bonne nouvelle. Un peu plus loin, on tombe sur les ouvrages sur l’éducation. Comment survivre aux colères du terrible two, comment leur donner confiance en eux, quelles activités extrascolaires choisir, comment leur faire faire leurs devoirs… et ce, jusqu’à ce que votre enfant chéri ait quitté votre nid.
Mais, dans tout ça, vous a-t-on expliqué comment VOUS vous alliez continuer à exister en tant que vous, en tant que personne, au milieu de toutes ces années de don de soi et d’attention à un autre ?
Je m’interroge sur le comment faire exister ce soi quand il cohabite en permanence avec d’autres entités, avec un conjoint, des enfants et d’autres individus composant la vie d’une femme. Quand matériellement on n’a pas toujours le temps de s’occuper de soi, de réfléchir à ses besoins ni de les mettre en avant. Quand les impératifs de la vie sont de lever des enfants, les nourrir, les habiller, les emmener à l’école, et faire tout en sens inverse le soir. Quand il faut gérer une carrière et/ou une maison, seule ou à deux. Quand il faut réussir son couple et sa vie sociale.
Comment nourrir la part de nous qui existait avant l’état d’être mère ? Comment transmettre cet endroit qui vit toujours en nous à nos enfants, en dehors des considérations matérielles du quotidien et des questions autour de l’éducation ?
Où trouve-t-on le temps de s’épanouir et de se demander si on est bien alignée ? Si on va dans le bon sens, dans le sens désiré ? Si on impulse le mouvement voulu à notre vie ? Ou si on n’est pas juste en train de suivre un mouvement imposé de l’extérieur ?
Où trouver le temps de se demander si on est toujours soi-même en fin de compte ?
Il y a peut-être quelque chose d’assez banal que nous oublions de faire au quotidien avec nos enfants, c’est simplement de parler de nous. Nous leur parlons d’eux, de l’école, de leurs copains, des devoirs à faire, des bains et des repas à prendre. Nous leurs parlons aussi de ce qu’ils veulent faire plus tard, de leurs centres d’intérêt et de ce à quoi ils rêvent. Mais est-ce que nous, nous nous racontons suffisamment ? Je ne vous parle pas de raconter en détails ce que vous avez fait de votre journée mais de raconter ce que vous avez vraiment vécu, au sens de ressenti.
Par exemple, « tu sais aujourd’hui j’ai été très fière de moi car j’ai animé une réunion qui s’est très bien passée. J’ai beaucoup travaillé dessus, ce n’était pas facile mais j’ai réussi ». Ou alors, « j’ai été heureuse de déjeuner avec mon amie ce midi. Ça faisait longtemps que je n’avais pas pris le temps de le faire et c’est très important pour moi de voir mes amis. »
Posez des mots sur vos sensations et vos émotions, sur vos bonheurs quotidiens. Vous n’aurez peut-être pas l’impression qu’ils en retiennent grand-chose au début. Mais, petit à petit, ils comprendront que quand vous déjeunez avec vos amis, cela vous rend heureuse ; que quand vous avez trouvé du temps pour faire ce que vous aimez (lire, courir, faire une visite ou du shopping), vous vous sentez ressourcée ; que vous êtes fière du travail que vous faites et que vous vous sentez valorisée par ce que vous accomplissez.
Vos enfants seront toujours heureux de vous voir heureuse. Ne vous oubliez pas quand vous êtes avec eux. Echangez aussi sur vous et sur vos aspirations au bonheur.
Vous adorez la peinture flamande du XVe siècle ? Vous êtes une mordue de triathlon ? Vous adorez cuisiner ? Partagez-le avec vos enfants ! Racontez-leur ce qui vous habite quand vous regardez un tableau, emmenez-les au musée et faites vivre cette passion en eux aussi. Faites des sorties vélo ou de course à pied avec vos plus grands pour leur donner l’envie de se dépasser comme vous. Nagez avec délice dans la Méditerranée l’été, dévorez des gâteaux que vous aurez préparé ou bricolez toute la journée, peu importe du temps que vous le leur racontez et qu’ils assistent au bonheur que cela vous procure.
Montrez-leur sans cesse qui vous êtes quand vous n’êtes pas – seulement – leur maman. Racontez-leur de quoi vous rêvez vraiment : d’une maison les pieds dans l’eau, d’un voyage au bout du monde, d’apprendre à danser ou juste d’avoir un gros chien. Et alors, vos enfants ne pourront jamais dire qu’ils ne vous connaissaient pas et qu’ils ignoraient vos rêves. Et vous, non plus, vous ne les ignorerez pas.
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