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Papa, Maman,
Parfois je trouve ça si dur le regard que les autres portent sur vous. Les regards qui se lèvent, les sourires qui naissent quand ils entendent votre voix. Alors que vous me demandez seulement comment ma journée à l’école s’est passée ou ce que j’ai envie de faire ce weekend.
Mon cœur se serre quand j’entends les réflexions et les mots terribles qui fusent. Des mots que je n’ai pas envie de vous répéter. Des mots qui blessent, des mots d’ignorance. Des mots qui prêtent une réalité à ce que je vis et qui prennent parfois plus de place que les miens. Alors, je me dis que c’est bien que vous ne puissiez pas les entendre. Que je veux bien les porter pour vous.
J’ai envie d’apprendre à être fière et n’en avoir rien à faire. Mais c’est si dur. Parfois, j’aimerais me cacher dans un tout petit trou où personne ne me trouverait. Je me demande souvent ce que ça fait d’avoir les parents des autres. Des parents « normaux » comme ils disent.
Je sais que vous ne m’entendez pas quand je ris. Vous ne connaissez pas le son de ma joie. Ni celui de mes peines d’ailleurs. Et vous expliquer ce que je ressens est parfois difficile et ne sonne pas juste. Il me faut décortiquer, décomposer, trouver le signe avec mes mains. J’en apprends un amour pour la précision et la justesse dans ce qu’on dit et ce qu’on vit. Chaque petite émotion doit trouver sa correspondance dans mes gestes, doit être extériorisée pour que vous puissiez la saisir.
Je vous promets que je vais apprendre. A être fière. A être votre fille. A accepter cette part si belle que vous me donnez. A être différente. Sans en avoir peur ni honte.
Quand je serai grande, je le revendiquerai même. Mais quand on est si petite comme moi, on veut juste être comme tout le monde.
Merci d’être les parents que vous êtes. Et pardon ne pas toujours être à la hauteur de votre différence.
Votre fille qui vous aime.
Crédit photo : @Hannah Haston