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Le deuxième trimestre touche à sa fin et dans beaucoup de familles, on commence déjà à préparer la rentrée prochaine. Pour certaines, on réinscrit tout le monde dans la même école et au mêmes activités, c’est juste un passage vers le niveau supérieur. Pour d’autres familles, tout va être à organiser… car si le travail de l’un des parents envoie tout le monde à l’étranger, c’est toute une vie qu’il va falloir recréer pour chaque membre de la famille.
A l’occasion de la sortie du premier album illustré pour enfants consacré à l’expatriation, voici une série d’articles pour accompagner les familles qui vont partir vivre à l’étranger. Aujourd’hui, comment l’annoncer à ses enfants ?
Un projet d’expatriation dans une famille, c’est un petit peu comme un projet de nouveau bébé. C’est une décision qui se prend en couple, sans consulter ses enfants… enfants qui vont être les premiers (avec vous) à en voir leur vie complétement chamboulée. Et, comme quand on décide d’agrandir la famille, on ne demande pas leur avis aux futurs grands frères et sœurs, quand on s’expatrie, on prépare tout dans l’ombre. En général, on n’en parle pas aux enfants tant que rien n’est sûr. Pourtant un jour, quand la négociation avec son DRH touche à sa fin ou que l’on connaît enfin le pays de destination, se pose l’inévitable question : ‘’Est-ce que cette fois, on leur dit ?’’.
Comme avec l’arrivée d’un nouveau bébé, il y a les tenants du ‘’C’est dans tellement longtemps. Ils ne vont pas comprendre. Ils n’ont pas de notion du temps, on leur dira bien plus tard.’’ ; et ceux du ‘’Les enfants, ils comprennent tout, même ce qu’on ne leur dit pas. Alors on leur dira dès que ce sera sûr, même s’il y aura encore des mois à attendre.’’
S’il n’y aura pas de signes évidents de l’expatriation à venir, comme le ventre d’une Maman qui s’arrondit, il va sûrement régner dans votre couple une atmosphère particulière faite de stress logistique (inscrire tout le monde à l’école au bout du monde n’est jamais une mince affaire) et de grande excitation. Les tout-petits (oui, nous sommes plutôt tenants du ‘’Les enfants ont des antennes’’) vont sûrement ressentir que quelque-chose se prépare, les plus grands risquent de vous poser la question directement. Alors, autant anticiper, plutôt que de risquer qu’ils l’apprennent par une grand-mère un peu trop bavarde !
Oui, comme pour une grossesse, cela risque d’être un peu long d’entendre vos enfants vous demander pendant des semaines, voire des mois : « Dans combien de dodos, on prend l’avion pour notre nouveau pays ? » ! Mais, comme pour une grossesse, cette expatriation à venir mûrira tranquillement dans la tête de vos enfants, avec tout ce que cela implique comme changements dans leurs vies.
A partir de 6-7 ans, les enfants commencent à se projeter dans un futur à plusieurs mois. Il est donc important de les informer d’une expatriation à venir pour ne pas les laisser fantasmer un futur qui n’existera pas. S’ils commencent à vous parler de la composition de leur équipe de foot à la rentrée prochaine, dès lors que vous êtes sûrs de partir, il est temps de leur expliquer les choses pour pouvoir ensuite orienter la conversation sur l’équipe qu’ils pourront intégrer dans votre futur pays.
Là encore, plusieurs écoles : vous pouvez leur dire tout simplement, au détour d’une conversation, lors d’une promenade en famille par exemple, ou convoquer tout le monde dans le salon pour une grande annonce officielle, carte du monde à l’appui. Si vous êtes une famille de joueurs, vous pouvez organiser une grande devinette pour faire trouver à vos enfants le pays où vous partez. Sortez les chapeaux de cowboy, le déguisement chinois, préparez un diner Thaïlandais… Bref, faites-les cogiter et participer.
Quoi que vous choisissiez de faire, la seule règle à respecter une fois que vous vous lancez, c’est d’être très clair avec vos enfants : utilisez des termes concrets et soyez direct (en douceur quand-même !). Si vous avez toujours vécu au même endroit, une expatriation, c’est d’abord un déménagement. Et un déménagement, c’est une rupture. Il n’y a pas de demi-mesure à trouver : on ne déménage pas à moitié, on ne part pas petit à petit. Ne laissez donc pas d’ambiguïté planer : ce ne sera pas temporaire, on ne pourra pas revenir tous les week-end, on va quitter la famille et les amis.
Tout comme on explique à des aînés que ‘’Oui, un bébé, c’est trop mignon’’ mais que, au début, il dormira beaucoup et ne jouera pas vraiment avec eux, présentez avec réalisme votre futur pays d’accueil. S’il y a des plages de rêve et des éléphants là-bas ou que vous comptez bien y faire du chien de traineau, c’est formidable de faire rêver vos enfants mais ne les laissez pas penser que tout cela va être leur quotidien. Parlez-leur de ces côtés formidables en équilibrant avec des détails sur leur nouvelle école, votre futur appartement, le fait qu’au début ils ne comprendront pas la langue du pays…
Une fois que vous avez bien énoncé les choses, les questions de vos enfants risquent de fuser… à moins que votre aînée ne parte directement s’enfermer dans sa chambre en pleurant ou que votre petit dernier n’accuse la nouvelle sans sourciller et qu’il vous demande s’il peut retourner jouer maintenant !
Bien sûr, votre aînée finira par se calmer et s’ouvrir au dialogue ; et bien sûr, votre tout petit a bien compris ce que vous venez de lui dire et n’y est pas du tout indifférent. Mais chacun d’eux a besoin d’un peu de temps pour digérer la nouvelle.
Que ce soit du tac-au-tac, ou à retardement donc, apprêtez-vous à répondre à tous types de questions.
Les tous petits enfants ont un côté très matérialiste ! Ce qui va les inquiéter le plus, c’est souvent le sort de leur chambre et de leurs jouets. Que pourront-ils apporter ? Auront-ils une chambre pour eux là-bas ? Vous pouvez les rassurer sur ces points en leur expliquant qu’ils pourront aider (un peu !) à faire les cartons et expliquer quand et comment ces cartons arriveront dans votre nouveau pays.
A partir de 6-7 ans, les enfants s’investissent beaucoup dans leur vie sociale. Ils passent beaucoup de temps avec leurs amis, parlent d’eux énormément, commencent à créer de vrais liens. C’est donc la séparation d’avec leurs amis qui va questionner le plus vos futurs petits expats. Expliquez-leur qu’ils garderont des liens avec eux et de quelle façon (se parler via Skype, se retrouver l’été, s’envoyer des cartes postales…).
Ensuite, en vrac et en fonction des âges et des centres d’intérêts, les questions pourront tourner autour de beaucoup des aspects de votre vie quotidienne à venir : Est-ce qu’on aura une voiture là-bas ? Comment on ira à l’école ? Est-ce que je pourrai aller à la danse ? Est-ce qu’on pourra manger la même chose au petit déjeuner ? Ne vous moquez pas de questions, parfois surprenantes de vos enfants. Il arrive souvent qu’ils fassent une petite fixation sur un élément apparemment anecdotique de leur vie quotidienne dans lequel ils trouvent du réconfort. Répondez-leur toujours avec sérieux (si possible) pour les rassurer sur tout ce qui les tracasse, même si cela vous semble anodin.
Si vous avez un animal domestique qui tient une place très importante dans votre famille, surtout renseignez-vous en amont sur le fait de savoir s’il pourra vous accompagner dans votre futur pays (ce n’est pas toujours possible et cela peut-être un vrai drame pour les enfants).
Voilà, tout le monde est au courant. Il y a des enfants qui se réjouissent à l’idée de partir vivre dans un autre pays, d’autres qui trainent les pieds, certains dévorent les livres consacrés à leur futur pays tandis que d’autres jurent que jamais ils n’apprendront la langue locale…
Pas de panique, tout va bien se passer. Dans un prochain article, nous parlerons des mois qui précédent le déménagement, un temps précieux pour habituer tout le monde à l’idée du départ et se projeter en famille vers cette nouvelle vie.
Mathilde Paterson
Auteur de Ulysse, petit expat – Le premier album jeunesse pour préparer les enfants à l’expatriation (3-7 ans)
www.heureuxcommeulysse.com
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