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Mon bébé est sorti de sa bulle en quelques mois !
Mon petit garçon Augustin n’était pas comme les autres enfants, il aimait faire tourner les objets, il aimait les regarder tourner et rouler pendant des heures. Les autres jeux et les autres enfants ne l’intéressaient pas, ni même sa maman…
Quand je le regardais à la crèche, il n’était jamais avec les autres mais toujours dans un coin à faire tourner ses assiettes.
Puis d’autres symptômes apparaissaient: Augustin avait beaucoup d’eczéma, il ne souriait plus. Son hypersensibilité tactile et gustative l’empêchaient de s’alimenter correctement, il était incapable de toucher un aliment avec ses mains.
Quand j’allais le chercher à la crèche le soir, il ne me reconnaissait pas, ne me regardait pas, je lui parlais, il me fuyait du regard…
Ma deuxième grossesse étant arrivée très vite, j’ai pensé dans un premier temps à une dépression. Augustin n’avait qu’un an quand son petit frère est né. Avec du recul, je me suis rendue compte que plus la grossesse avançait, plus les signes d’enfermement étaient importants.
Augustin étant mon aîné et n’ayant pas de moyens de comparaisons je relativisais ces signaux d’alerte, d’autant plus que les pédiatres me disaient que mon fils se portait bien. J’ai beau eu leur faire confiance, j’étais pourtant persuadée que quelque chose le faisait souffrir.
Après plusieurs mois d’inquiétude et d’incertitude, la crèche m’a alerté et m’a proposé de prendre un rendez-vous avec le CAMPS. Un centre qui prend en charge les « enfants différents » me disait-elle.
J’étais devant le fait accompli, oui ces mots étaient durs, il y’avait donc réellement un souci. Il fallait quelqu’un de l’extérieur pour m’ouvrir les yeux et m’aider à voir enfin la réalité en face.
J’ai alors tout de suite appelé une amie dont le fils aîné est atteint du syndrome d’Asperger. Elle m’a dit de contacter très vite Marie-Christine Laznik, spécialiste de la prise en charge des bébés à risque de TED (trouble envahissant du développement).
« Elle peut faire des merveilles mais il ne faut plus perdre de temps » me disait-elle. J’ai obtenu rapidement un rendez-vous avec elle. Après un long temps d’observation et plusieurs tests, elle m’a bien confirmé qu’il y avait un trouble relationnel.
Le test qui m’a le plus frappé était lorsqu’elle lui a demandé : « Augustin, viens nous servir un petit café avec maman ». Test qui cherche à montrer le désir qu’a l’enfant de faire plaisir à sa maman. Je savais déjà qu’il ne le ferait pas. Du haut de ses 18 mois, mon Augustin en était malheureusement incapable. En effet au lieu de vouloir faire plaisir à sa maman en allant chercher une tasse de café de dînette, Augustin se servait des assiettes pour les faire tourner et rouler : beaucoup plus intéressant que ces deux dames qui discutaient.
Madame Laznik m’a alors conseillé de le retirer immédiatement de la crèche. Les jours étaient désormais comptés, le cerveau d’Augustin était encore malléable, il avait 18 mois et nous pouvions encore agir. Alors que le pédiatre de la crèche me conseillait de le laisser pour le « sociabiliser », Marie-Christine Laznik insistait pour un retrait immédiat. Pourquoi de tels divergences ? Qui suivre ? J’ai alors fait entièrement confiance à madame Laznik qui me disait que mon fils était hypersensible aux bruits et à la collectivité, qu’il avait besoin d’être chez lui, dans son cocon. « La crèche le décentre, le désorganise » me disait-elle.
Nous avons ensuite organisé un suivi pluridisciplinaire avec une pédopsychiatre et une sensori-motricienne (rééquilibrage des sens par la psychomotricité). Ma présence pendant les séances était indispensable pour que le thérapeute avance.
J’ai compris très vite la nécessité de m’arrêter de travailler pour construire une relation maman-enfant que je n’avais finalement jamais eue. Non pas par ma faute, ni par mon manque de temps ou de désir de rentrer en relation avec mon fils, mais parce que LUI ne rentrait pas en relation avec moi, parce que LUI me fuyait. Je n’ai jamais pu porter mon fils en porte-bébé, parce que LUI refusait et hurlait. Je n’étais pas coupable de cette absence de relation et c’était le plus dur à comprendre et à accepter. C’est le bébé par son regard, son babillement et son appétence à l’autre qui est à l’initiative de la relation. Suite à son appel, la maman répond et rentre en dialogue avec le bébé.
Si le bébé ne cherche pas le contact par son regard et ses appels, cela peut épuiser la capacité des parents à entrer en contact avec lui.
Quelques mois de prise en charge et la pédopsychiatre voyait déjà des progrès. Elle me disait qu’à 20 mois, nous pouvions encore faire beaucoup de choses et me proposait de mettre en place la méthode des 3i.
Nous avons alors rencontré madame de La Presle, directrice de l’association AEVE (autisme espoir vers l’école) qui nous a expliqué la méthode et son efficacité: celle-ci consiste à faire venir des adultes bénévoles qui se relaient toute la journée pour jouer avec l’enfant et le sortir de sa bulle de façon Intensive, Individuelle et Interactive (3i), basée sur l’imitation.
Le principe nous a plu : L’adulte doit suivre l’enfant, il imite le moindre geste et n’impose aucun jeu. Si l’enfant veut s’allonger, le bénévole s’allonge, si l’enfant saute, le bénévole saute. J’ai été conquise par les exemples filmés : au départ l’enfant fuit le bénévole et s’intéresse à son obsession ou à sa stéréotypie (faire tourner un ballon par exemple) puis le bénévole l’imite: il fait tourner le ballon. Alors l’enfant réalise qu’on s’intéresse à son plaisir à lui. L’adulte est rentré dans la bulle de l’enfant et une fois rentré dedans, l’adulte pourra ramener l’enfant à lui en enrichissant le jeu « et si on lançait le ballon tous les deux ».
Mais pour mettre en place la méthode des 3i, il fallait être prêt à s’engager sur au moins deux ans, réorganiser l’appartement et transformer une chambre en salle de jeux: espace qui devait être le plus épuré possible. Notre vie risquait d’être chamboulée.
Mais nous avions la solution entre les mains et nous aurions pu regretter toute notre vie de ne pas l’avoir fait.
Nous avons alors transformé la chambre des enfants en véritable salle de jeux : un toboggan, un trampoline, un hamac, des murs blancs, des étagères sur lesquels ne sont posés que quelques jouets en double, une fenêtre opacifiée, du lino au sol, des lits à plier/déplier pour la nuit. Le changement fut difficile mais la motivation était là.
Pourquoi une telle exigence ? Les enfants comme Augustin sont extrêmement sensibles au bruit, et voient tous les détails au détriment de « l’autre ». Leur sens sont surdéveloppés. Plus on les coupe de ces bruits et détails visuels, plus ils seront en mesure de regarder l’autre et donc de rentrer en relation avec lui.
Trop de jouets pouvaient le disperser. Des jouets en double étaient nécessaires pour que le partenaire de jeux puisse imiter Augustin.
Nous devions ensuite chercher des bénévoles que nous avons trouvé sans difficultés. Nous avons été impressionné par la mobilisation des gens, par leur disponibilité et leur générosité.
Cela leur demandait de la régularité (1h30 par semaine) mais cela ne les a visiblement pas freinés. En deux soirées, ils étaient formés à la méthode par madame de La Presle.
Augustin a commencé à deux ans et à ma grande surprise, il rentrait dans la salle de jeux avec son partenaire de jeux sans aucune difficulté. Les heures et les semaines s’enchaînaient.
Les bénévoles rentraient dans le monde d’Augustin et de ses balles. Ils passaient des heures à lancer et faire tourner des balles ensemble.
Je me suis rendue compte de la richesse de cette méthode: 1h30 à imiter un enfant, c’est beaucoup d’énergie. Il est donc important que les nouveaux amis d’Augustin se succèdent et qu’ils apportent chacun de la nouveauté et une nouvelle énergie.
Cela aurait été impossible en tant que maman de rentrer toute la journée dans les stéréotypies de mon fils. Elles sont difficiles à accepter et une maman aura tendance à cacher toutes les balles pour ne plus avoir à se confronter à cette réalité. Ce relais était donc indispensable…
Les progrès d’Augustin étaient impressionnants et en quelques mois, je ne le reconnaissais plus. Les obsessions des objets laissaient place progressistes à la relation. Il retrouvait le sourire et la joie de vivre.
Puis Augustin s’est mis à parler.
Il est évident que c’est l’association de la prise en charge pluridisciplinaire et de la méthode des 3I qui a permis d’obtenir de tels progrès.
Augustin n’est pas allé à l’école la première année de maternelle mais a continué la méthode des 3i à plein temps à la maison. Il continuait les progrès malgré le besoin encore évident d’être isolé des bruits, des situations qui auraient pu le surcharger sur le plan sensoriel et émotionnel. Sa fatigabilité était largement plus importante que chez un autre enfant.
Puis Augustin est rentré à l’école à 4 ans, seulement 2h le matin afin d’éviter les récréations.
Deux heures d’école et Augustin rentrait épuisé, il lui fallut au départ lancer des balles en rentrant à la maison pour se décharger. Mais les deux heures d’école se déroulaient normalement à notre grande surprise et à celle de la maîtresse qui insistait même pour augmenter ses heures de présence à l’école. Nous avons alors compris qu’Augustin guérissait…
La pédopsychiatre nous a ensuite annoncé qu’Augustin n’aurait pas besoin d’AVS (aucun trouble de concentration et une excellente capacité cognitive).
Puis l’année suivante, Augustin a pu rentrer en moyenne section et suivre l’école toute la matinée. Il a aujourd’hui plein d’amis et continue de voir ses amis bénévoles l’après-midi.
Augustin est guéri même s’il doit désormais construire son psychisme pour retrouver un bon équilibre !
Nous sommes aujourd’hui persuadés qu’Augustin n’aurait jamais pu vivre en collectivité sans y aller aussi progressivement. C’est parce qu’il continuait la méthode des 3i en étant dans son cocon sensoriel à mi-temps, qu’il pouvait retourner à l’école le lendemain.
Aujourd’hui avec du recul, je réalise qu’Augustin me montrait déjà tous ses symptômes dès sa naissance : hypersensibilité aux bruits et à de nombreuses matières ; hurlements lors des déshabillages, souffrances dus à des reflux, absences de sourire, regards fuyants entre 0 et 1 an…
Je comprends mieux et je sais qu’il est possible de sauver ces bébés, la plasticité cérébrale des bébés est si malléable si on les prend en charge dés leur plus jeune âge, même à 3 mois ! Plus la prise en charge est précoce moins le risque de séquelle est important.
Aujourd’hui une association, Ma bulle a éclaté sensibilise les parents sur un diagnostic précoce et une prise en charge pluridisciplinaire pour leur bébé à risque!
L’association propose de nombreux contacts de praticiens, des témoignages des parents, des explications sur la méthode, des conseils…
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