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Cette phrase n’est pas de nous mais de Denis Sonet, formateur de conseillers conjugaux et d’éducateurs au CLER, mais on n’aurait pu mieux dire. Avec l’arrivée des enfants, le couple s’efface peu à peu pour devenir la famille. Quel plus beau projet de couple que de devenir parents, direz-vous à raison ; mais être une famille unie dans laquelle chacun peut s’épanouir repose toujours sur un couple harmonieux.
Les enfants bouleversent absolument tout dès leur arrivée. Ils réduisent notre temps, notre disponibilité à nous-mêmes et aux autres, ajoutent une quantité de choses à penser et d’actions à réaliser, nous plongent dans un bain de nouvelles émotions très intenses, nous mettent face à nos contradictions individuelles et à nos désaccords de couple,…Chacun devient parent, séparément, face à son ressenti et des attentes issues souvent de sa propre culture, de son histoire individuelle. Il y aura des perceptions différentes, des envies inconciliables mais aussi des désaccords d’éducation. C’est normal, c’est le lot de tout projet d’équipe et le désaccord fait avancer tout le monde s’il est une source d’échanges.
Mais même dans les couples qui sont parfaitement d’accord sur la façon d’élever leurs enfants, il est des ruptures silencieuses, des fissures qui se créent dans la durée et ne se constatent que lorsqu’elles ont presque complètement séparé les cœurs. Parfois, il n’y a pas de conflit ouvert, d’esclandre, de manifestation extérieure de la scission qui est en cours. Pourquoi ? Parce que happés que nous sommes par notre nouvelle mission, la joie, la peine, les défis qu’elle nous présentent, nous n’avons simplement plus la tête à autre chose.
L’autre chose c’est notre couple…Or le couple n’est pas du tout « autre chose », n’est pas du tout une réalité acquise mise au service de la famille. Le couple n’est pas une base qu’on peut abandonner une fois construite puisqu’elle est finie. Le couple est le moteur, la source, le carburant de tout. Le couple doit continuer à vivre et à grandir pour assurer sa mission d’élever des enfants. Le couple est une masse vivante qui continue d’évoluer quand chacun de ses membres changent devant les défis de la vie.
Quand ont devient parents, on a vite tendance à oublier de continuer à nourrir son couple. On se concentre sur ce beau projet, on mesure sa chance, on est un peu submergés par l’ampleur et l’importance de la tâche d’élever des petits êtres en devenir, on trouve une autre source d’amour qui parfois nous suffit,…Revenir au couple peut-être vécu comme un retour en arrière, une forme d’individualisme. Je sors, je me dédie à mon couple et je délaisse mes enfants au profit de mon époux ou mon épouse, a-t-il/elle autant besoin de moi que mes enfants qui sont si petits ? la réponse est oui, indéniablement. Votre conjoint(e) a toujours infiniment besoin de vous et vous de lui. Pour vous aimer, pour vous faire grandir, pour vous accompagner dans la parentalité ce défi que vous vivez ensemble, pour vous soutenir dans votre vie individuelle et son lot de joies et de difficultés, pour rendre tout ce que vous réalisez seul(e) encore meilleur et adoucir le poids de ce qui vous fait souffrir.
Etre de bons parents c’est le souhait intime de chacun et de chaque couple. Et même si c’est assez contre-intuitif, pour bien faire, il est indispensable d’être heureux seul et en couple. Car comme nous l’avons sans doute tous constaté, quand nous sommes malheureux, tristes ou tendus ; seuls ou à deux ; fatalement nous ne sommes pas bien avec les enfants. On ne peut pas être bien avec les autres si on n’est pas bien avec soi-même, le premier service que nous nous devons c’est à nous-mêmes puis au couple. Les enfants ont beau être le trésor de nos cœurs ; le premier enfant du couple c’est bien le couple.
Une fois qu’on a dit ça, comment faire ? La panacée serait évidemment de trouver du temps régulièrement pour des soirées, des week-ends et des vacances sans enfant. Si les budgets et le rythme ne le permettent pas, voici quelques idées à vivre au quotidien.
Bien communiquer: bien communiquer c’est partager ce qui nous est difficile à dire, c’est se confier sans orgueil et sans faux-semblant. Accepter ses émotions et les remettre dans les mains de l’autre qui les accueille avec bienveillance. Bien communiquer est une des clefs pour entretenir l’intimité d’un couple dans le quotidien et la durée. C’est rentrer le soir, reconnaître et avouer qu’on n’est pas bien parce qu’on a mal pris une remarque de son boss et avoir quelqu’un en face de vous qui, quelle qu’aurait été sa propre réaction, se concentre sur votre ressenti et non son jugement. Bien communiquer c’est se mettre à la place de l’autre mais aussi lâcher prise et abandonner ses émotions avec lui ou elle. C’est grandir à deux et se soutenir.
Garder en tête qu’un couple c’est 1 personne + 1 personne + 1 relation. Si vous vivez une souffrance dans votre couple, n’en rendez pas systématiquement l’autre responsable. Essayez de chercher la source, le couple en est-il vraiment l’origine ? Ce dont vous avez besoin aujourd’hui et qui semble vous manquer, ne pouvez-vous pas le trouver ailleurs en vous-même ? Un exemple : je souffre de ne jamais recevoir de compliment de mon mari, j’ai tout le temps l’impression que ce que je fais n’est pas reconnu ou pas assez. Qu’est ce qui m’empêche de me féliciter toute seule ? Qu’est ce qui m’empêche de reconnaître moi-même ce que je fais de bien ? Vous pouvez même prendre l’habitude de noter vos accomplissements ou vos joies et entraîner vous-même votre propre confiance en vous.
Voir le bien chez l’autre: toujours plus facile au quotidien de voir le coup de main qui ne vous est pas donné, l’attention qui n’est pas accordée, le mot gentil qui n’est pas dit…essayez de changer votre regard au quotidien pour mettre l’accent au contraire sur ce qui vous est donné, les petites gentillesses,…elles ne seront peut-être pas là où vous les attendez mais elles sont là quand même et ce sont des preuves d’amour
Donnez l’exemple : vous savez quand on vous a dit que vos enfants diraient merci si vous le faisiez vous-même, qu’ils auraient surement plus envie de lire s’ils vous voyaient le faire, etc…et bien vous pouvez dupliquer ce principe avec votre conjoint(e).Vous en verrez très rapidement les bénéfices dans les attentions, les mots, la douceur au quotidien.
Refaire régulièrement votre choix : rappelez-vous, vous auriez tout donné pour un regard de lui parce qu’il est tellement ceci ou cela. Avec le temps, les qualités ne s’amenuisent pas ; seul le temps en érode notre perception et nous fait oublier pourquoi on s’est engagé avec notre conjoint(e). Alors reprenez régulièrement le réflexe de le regarder avec les yeux de l’amour, ceux qui le mettent en valeur parce que oui, même si elle est carrément maniaque au quotidien, elle est quand même extra et vous l’aimez.
Tout cela pour remplir votre « réservoir d’amour » individuel. Chaque personne a une sorte de compte en banque d’amour. Lorsqu’il est bien rempli par de l’amour partagé (quelle qu’en soit la forme), une remarque négative, un désaccord, un conflit vont le diminuer mais sans l’amener à découvert. Vous serez capables de faire face à la situation et d’avancer de façon constructive. S’il est proche du déficit ou carrément négatif, la moindre petite anicroche devient un esclandre, une source de douleur profonde et on peine à trouver des solutions. Et on creuse son déficit de manière exponentielle. Ce sont les déficits de long terme et à répétition qui séparent les couples
Alors efforcez-vous de maintenir votre capital amour rempli au maximum de façon à pouvoir affronter les tempêtes individuelles, de couple ou de famille. Et rappelez-vous que c’est aussi et surtout une de vos priorités.