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Adopter des enfants porteurs de handicap
Témoignage de Claire, maman d'enfants particuliers

 
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Article mis à jour le 1 février 2024

Rencontre avec Claire, maman de 6 enfants dont trois porteurs de handicaps. Avec son mari, ils ont décidé d’adopter des enfants porteurs de handicap, avant d’accueillir naturellement leurs deux petites dernières. Une vie mouvementée, pleine de joie et si riche, dont elle nous parle en quelques mots.

Bonjour Claire, pouvez-vous vous présenter ainsi que votre famille ?

Je suis Claire, maman de 6 enfants : Philibert 20 ans, Jacques 18ans, Hilaire 16ans, Aliette, 14ans, Antoinette 12 ans et Elisabeth 10ans. Avec mon mari Régis nous avons adopté les 4 ainés. Nos deux dernières sont nos filles biologiques. Nos ainés Philibert et Jacques sont porteurs de trisomie 21. Hilaire a une maladie génétique rare entrainant un retard mental, et Aliette, est multi-dys : dysorthographique, dyslexique etc, ce qui complique un peu son quotidien.

Vous avez choisi d’adopter des enfants porteurs de handicap, comment vous est venue cette idée?

Lorsque nous nous sommes mariés, la vie était belle. Nous avions le projet de fonder une famille, mais nous n’arrivions pas à avoir d’enfants. Le projet d’adoption est arrivé assez vite, d’autant ps que l’adoption a toujours été dans un coin de notre tête. Nous nous sommes orientés vers les enfants handicapés en partant du principe qu’eux n’avaient pas de parents, nous n’avions pas d’enfants, et ce n’est pas parce qu’ils étaient différents qu’ils devaient rester en foyer toute leur vie. Ils avaient aussi droit à une vie de famille. L’idée a muri pendant 7 ans, puisqu’on a eu notre premier enfant, Philibert, au bout de 7 ans de mariage. Lorsque nous nous sommes tournés vers l’adoption d’enfants porteurs d’un handicap, nous n’avons pas décidé d’adopter un trisomique. Nous avons choisi d’adopter une enfant, un bébé, qui accessoirement était porteur de trisomie (nuance!).

Comment se sont passées les premières années de vos garçons (santé…) ? Quels ont été les différentes prises en charge et les soins mis en place? Et aujourd’hui, où en sont-ils?

A partir de leur arrivée dans notre famille, notre vie est devenue un tourbillon de prises en charges. Tous les deux étaient des enfants fragiles, souvent malades. Nous avons passé beaucoup de temps chez le pédiatre, la psychomotricienne, les kinésithérapeutes pour les aider à se muscler ou pour faire de la kiné respiratoire, chez les ergothérapeutes et les orthophonistes. C’était un véritable emploi du temps de ministre où il fallait gérer les enfants malades, les trajets des uns et des autres, les prises en charges mais aussi les absences des différents intervenants.

Maintenant, en grandissant, les rendez-vous sont un peu moins nombreux. Les enfants sont moins malades. La vie s’est en revanche un peu compliquée puisque Philibert a déclaré une maladie cœliaque, une hypothyroïdie et un diabète. Il est incapable de gérer lui-même son diabète, ce qui demande une surveillance toutes les 2 ou 3 heures puisqu’il ne sait pas montrer de signes d’hypo ou d’hyperglycémie. Notre second, Jacques, a déclaré une maladie psychiatrique qui a vraiment compliqué le quotidien. Et pour finir, Hilaire a aussi beaucoup d’allergies, générant elles aussi de nombreux rendez-vous.

Quel est/a été leur parcours scolaire ?

Leur parcours scolaire est peut-être le point noir de leur vie et de la nôtre, je pense qu’en France on est loin d’être au niveau !

Les deux ainés ont d’abord été en maternelle classique, puis en ULIS (Unité Localisée d’Inclusion Scolaire) en primaire et IME (Institut Médico-Educatif) où leurs journées sont un peu allégées par rapport aux horaires d’écoles classiques. Nous avons longtemps du nous battre. En maternelle ils ne pouvaient aller en classe qu’en pointillés, d’abord 2 heures, puis une demi-journée, puis deux demi-journées. C’était un peu au compte-goutte et nous avons du batailler pour qu’ils puissent aller à l’école à temps plein ! Nous n’’avons jamais vraiment obtenu gain de cause.

Nos enfants n’ont pas toujours eu d’AVS (Auxiliaire de Vie Scolaire) et leur intégration a été mitigée, parce qu’ils n’ont jamais été acceptés à la cantine. Cela a été dur et compliqué puisqu’il a fallu faire tous les trajets. Les maîtresses n’étaient pas toujours formées pour s’occuper d’enfants à particularités. Certaines cherchaient surtout des résultats scolaires alors que nous, nous voulions surtout qu’ils puissent être intégrés et sociabilisés, qu’ils soient entourés d’amis pour les tirer vers le haut. Ils progressent beaucoup par mimétisme. Côtoyer des enfants « normaux » ne pouvait que les aider à être propres et à aller aux toilettes comme tout le monde, à jouer dans la cour au ballon etc.

Hilaire a pu faire une maternelle classique puis il a intégré une école indépendante très bien où il a pu avancer à son rythme. Il a été bien accueilli avec un programme adapté juste pour lui, ce qui lui a permis de faire des pas de géant. Il est maintenant en collège dans une ULIS et ira ensuite travailler en ESAT (Etablissement et Service d’Aide par le Travail).

Trouvez-vous que la société soit adaptée et concernée par ce type de handicap ? Quelles sont les aides, les structures mises en place ?

Globalement non. La société a encore du mal à voir d’un œil positif les enfants porteurs de handicap. Lorsqu’une maman attend un bébé trisomique la société est très sceptique, voire propose d’interrompre la vie du bébé plutôt que de le laisser naître et grandir. En revanche, la prise en charge après la naissance est plutôt chouette : la plupart des intervenants sont supers, nous avons eu affaire à des éducateurs vraiment compétents, très positifs avec nos enfants et motivés pour les faire grandir et évoluer. Ils prennent nos enfants comme ils sont.

Quand on croise des gens dans la rue, à 90% on a des réflexions positives, des sourires, des clins d’œil. Comment cela pourrait-il être autrement quand on est avec notre Philibert qui va caresser la tête, rigoler, sortir une blague ? C’est plutôt la génération des adolescents qui est mal préparée, qui a une mauvaise formation sur le handicap. Certains sortent des réflexions très dures à l’égard de nos enfants, ce qui fait beaucoup souffrir leurs sœurs qui vivent au quotidien avec eux et qui ne voient pas les choses de la même façon.

Ce sont généralement ces jeunes, peu ou pas formés, qui parlent très vite d’avortement. Ils peuvent aussi utilise des termes comme « gogoles« , « débiles mentaux » et peuvent être beaucoup plus violents. Je pense qu’ils ont entendu des choses très dures qu’ils répètent sans réfléchir. Et puisqu’ils ne savent pas ce que c’est, ils parlent méchamment voire violemment de personnes qui ne demandent qu’à être aimées et aimantes.

Qu’est-ce qui a été le plus compliqué à gérer, au quotidien ou au long cours?

Je dirai que le plus compliqué est de trouver les aides. C’est à nous de nous battre en permanence pour obtenir les bonnes structures, les bonnes places, sachant qu’il y a peu de structures et pas assez de places. Il faut être solides, volontaires et déterminés dans ce parcours du combattant sinon on n’obtient rien pour nos enfants.

Il y a de belles structures mais pas assez nombreuses, pas toujours adaptées en France. A Dijon, l’IME est bien mais nos enfants ne sont pas toujours tirés vers le haut. L’intégration dans le monde du travail est parfaite sur le papier mais en pratique elle est quasiment inexistante puisque la société est tournée vers les plus performants. En conséquence, dès que tu as un peu de mal on estime que tu ne pourras pas travailler plus tard. Alors tu restes en foyer d’accueil occupationnel, avec des activités manuelles mais pas de travail. Alors que, comme tous, un adulte handicapé qui travaille et qui a un but au réveil le matin, est motivé pour donner le meilleur de lui-même.

Ensuite, le quotidien est parfois lourd, dur à gérer. C’est une vie sans bouton pause, en tout cas pour le moment, et c’est physiquement épuisant.

Avez-vous pu trouver du soutien ? Associations, famille, amis ?

En tant que maman, j’ai deux sœurs qui m’ont soutenue depuis le début. Je peux me tourner vers elles pour pleurer, rire, râler, crier. J’ai donc une chance inouïe. Mais ce n’est pas le cas pour tout le monde. C’est parfois très difficile car les gens ne savent pas comment réagir. Il existe des associations de soutien, mais ce n’est pas trop nôtre truc. Nous avons aussi des amis en or, qui sont fidèles.

C’est vrai que notre situation réduit le nombre d’amis, le nombre d’activités avec des amis, parce que même une promenade en foret devient plus compliquée. Mais nous avons rencontré des gens en chemin qui sont beaucoup plus riches, uniques. Ce sont des personnes que nous n’aurions pas croisé ou sur qui nous ne nous serions pas arrêtés si nous n’avions pas eu d’enfants handicapés. C’est donc très enrichissant et nous avons des discussions vraiment profondes avec eux.

Vous avez sûrement eu de grandes difficultés au quotidien, mais aussi des joies. Pouvez-vous nous en partager ?

En tant que maman, si c’était à refaire je le referais. Même si notre quotidien est différent, même si je vois peu mes amies. Aujourd’hui, par exemple, j’avais un groupe cuisine auquel je ne peux pas aller. J’ai trop de choses à faire, des enfants à récupérer à droite et à gauche. Néanmoins, je le referais car nos enfants sont des bonheurs sur pattes, des rayons de soleil au quotidien malgré les difficultés ! Et on ne s’embête pas.

Des joies et des rires, nous en avons tous les jours ! Par exemple quand le matin les filles descendent au petit-déjeuner en faisant la tête parce qu’elles n’ont pas envie d’aller à l’école et que leur frère arrive déguisé en gendarme en leur faisant un câlin, une blague alors qu’il faut partir à l’école. Cela fait rire tout le monde.

Il y a quelques années, nous sommes partis 48h dans le Jura pour montrer la neige aux enfants et faire du ski de fond. Ca n’a été que des bosses et des chutes ! Mais aussi, et surtout, des éclats de rire dans tous les sens ! Nous étions complètement fous mais on a amusé tout le monde !

Pendant la pandémie, notre ainé a été cas contact au covid-19. Il a du rester 10 jours à la maison. Depuis, quand je lui demande « On va à l’IME ? » Il me répond « oh non, cas contact ! » avec un grand sourire ! Parce qu’il n’a aucune envie d’y aller et qu’il est très bien à la maison.

Un jour, Jacques m’a aussi dit « maman tu es une belle merde » ! Devant mes gros yeux a repris « mais non maman, une belle mère, de Dieu, je t’aime plus que le Ciel !  » Cela m’a fait sourire aussi.

Ou encore notre Hilaire qui râle parce que les gens sont sales. Il ramasse tous les papiers dans la rue…

Nos enfants porteurs de handicap n’ont pas de barrière, pas de filtre. Leurs réactions sont spontanées, sans retenue et ils nous font bien rire !

Avez-vous des projets en famille? Un dernier mot à partager?

Nous voulons surtout que notre famille reste aussi heureuse, soudée ! Nous souhaitons que nos filles vivent bien le fait d’avoir des frères handicapés. Globalement elles sont parfois dégoutées par certaines réactions. Quand elles ont un chagrin, leur frère est leur nounours. Elles se blottissent dans ses bras et lui racontent plein de choses. Il est leur confident. Adolescentes elles ne pensent qu’à les cajoler, les enlacer et sont fières d’eux.

Nous aimerions aussi voyager en famille à Lourdes, mais aussi à Rome, à voir si cela sera un jour possible !

Nos enfants, qu’ils soient biologiques ou non, handicapés ou non, nous les aimons tous aussi fort. Le lien qui les unit est si fort. Ils sont comme des frères et sœurs de sang. Heureux de vivre, ils nous le montrent tous les jours par leur joie, leur bien-être. Ils sont bien dans leur peau, chacun avec son tempérament de jeune adulte. C’est finalement tout ce que peuvent souhaiter des parents, n’est-ce pas ?

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