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Joséphine: Je m’appelle Joséphine, j’ai 26 ans, mariée depuis 2 ans et je suis maman de vrais jumeaux : Wandrille et Grégoire nés en avril 2019. Ils ont donc un peu plus de 9 mois et sont nos premiers enfants.
Fanny: Fanny, 32 ans, chargée de communication digitale en congé maternité. J’ai 3 filles : Colombe (2,5 ans) et les jumelles Agathe et Castille (bientôt 4 mois).
J’ai appris que nous attendions des jumeaux lors de l’échographie de datation. Mon mari ne pouvait pas être présent mais comme dans notre tête il s’agissait juste de « dater », j’y suis allée plutôt détendue !
La sage-femme m’a posé beaucoup de questions qui s’enchaînaient tellement que lorsqu’elle m’a demandé «Avez vous des jumeaux dans la famille?», j’ai simplement répondu que «oui, beaucoup de faux jumeaux» sur un ton badin attendant la prochaine question. «Ah, et bien il y aura dorénavant des vrais jumeaux dans la famille!»
Je me souviens avoir demandé si c’était une blague, puis le rire et les larmes se sont mêlés. Je ne sais pas vraiment si j’ai pleuré de joie ou de peur. Elle m’a ensuite fait écouter les deux petits cœurs, et cela m’a un peu calmé. J’ai pris conscience que ça me ne serait pas une grossesse normale et j’ai commencé à poser des questions.
En sortant du cabinet j’avais plusieurs messages de mon mari qui voulait savoir si tout allait bien, comment cela c’était passé. Honnêtement j’avais pris un sacré coup de massue. Plutôt que de lui dire «Tout va bien, je te raconte en détail ce soir!», je lui ai dit «On en parle tout à l’heure!» . Immédiate panique de l’autre côté du téléphone! Je me suis sentie bête: Il imaginait le pire alors qu’au fond tout allait bien, juste doublement bien… Je lui ai donc rapidement dessiné deux petits bébés en train de faire une bêtise et j’ai écrit: Les bêtises c’est plus drôle quand on est deux.
La journée de travail s’est enchaînée sans qu’il puisse répondre. Le soir en rentrant il a ouvert la porte en me demandant: «C’est une blague?!» Le fait qu’il soit un peu sous le choc m’a permis d’atterrir et de regarder la situation avec un peu d’enthousiasme. Oui nous allions en avoir deux! Une aventure à vivre ensemble, un truc qui n’arrive qu’aux autres et c’est finalement pour nous! Et après tout pourquoi pas! Finalement le reste de la soirée nous avons plaisanté sur cette situation peu commune et ainsi l’aventure à commencé.
Au rdv pour la 1ère échographie, le sage-femme nous dit avant de commencer : «Je vous rappelle rapidement le but de l’écho : Voir si tout se déroule bien et si c’est une grossesse multiple ou non» Je me tourne alors vers mon mari en plaisantant : « ah oui tiens, c’est vrai, on avait oublié cette éventualité de plusieurs enfants d’un coup ah ah!»
Puis il pose la sonde sur mon ventre. Et là, arrêt sur image. Je vois non pas 1 mais 2 bébés l’un au dessus de l’autre. Je pense tout de suite : «soit il y a plusieurs coupes avec l’appareil, soit le maïeuticien nous fait une petite blague, soit on attend des jumeaux». Le sage-femme fait une pause. Et nous demande : «…Que voyez-vous?» je réponds «il y en a 2…! » Il répond « oui ! » tandis que mon mari s’exclame : « non ! » en réalisant soudainement…
Ma 1ère réaction : black-out, sidération et sensation de vide abyssal face à l’inconnu. Moi qui aime anticiper et maîtriser, je n’avais pas envisagé ce scénario… Excitation et joie en même temps, ça promet d’être une belle école de confiance et d’abandon… un peu rock n’roll !
Je reprends mes esprits et m’entends demander aussitôt : «Vous pouvez vérifier qu’il n’y en a pas un 3ème planqué derrière?!» Mon mari, quant à lui, se tourne vers moi et me demande paniqué : «Mais comment va t-on faire pour la voiture ?! Et on va devoir déménager !! » Bref, le sens de l’émerveillement au masculin…
Les débuts ont été assez fatigants et les nausées très fortes puisque double dose d’hormones. Contre la fatigue et les nausées, j’ai opté pour le sport. J’ai pratiqué essentiellement le rameur puis quand le ventre est sorti, la natation et la marche. Cela m’a beaucoup aidée! Le sport permet de faire circuler l’oxygène et les nausées sont moins fortes. Se sentir fatiguée par l’effort, psychologiquement, cela fait du bien.
Il s’agit d’une grossesse monochoriale, bi-amniotique. Ça, c’est le jargon scientifique pour dire que Wandrille et Grégoire sont de vrais jumeaux. Mais ils étaient dans deux poches de liquide différentes. Le suivi est donc bi-mensuel afin de vérifier l’absence du redouté «syndrome transfuseur-transfusé» qui peut entraîner des complications pour le bon développement des bébés. J’ai donc eu la chance de voir mes deux bonhommes deux fois par mois en échographie!
Au début, les médecins n’ont pas exclu un accouchement à terme et par voie basse. Je suis jeune, en bonne santé et ma grossesse se passe très bien. L’aventure a pris un tournant à 32 SA : Depuis deux semaines, je me plains de démangeaisons terribles et compulsives, j’ai l’impression d’avoir des puces. Une prise de sang et un contrôle des urines sont faits un matin. En début de soirée, je regarde mon portable délaissé pour la journée et j’ai 3 messages vocaux du centre d’analyses. Un médecin m’explique que je devrais aller à l’hôpital faire un monitoring car j’ai un taux de protéines très élevé dans les urines et un grand manque de fer. Nous allons donc à l’hôpital confiants malgré tout. Je sens bouger les deux enfants et surtout je me sens vraiment en forme.
Je ne ressortirai malheureusement pas de l’hôpital avant l’accouchement: Cholestase et pré-eclampsie. C’est la période de ma grossesse que j’ai le plus mal vécue! Le monitoring est rassurant, je me sens bien, et je ne veux pas rester enfermée entre 4 murs loin de chez moi. Il reste tant à faire et mon mari et moi allons bientôt connaitre une sacrée vague de changements. Il n’y aura rien à faire. On me refuse l’HAD. Seules quelques sorties me sont accordées. Le rythme de l’hôpital n’a rien de reposant avec les levés matinaux, les multiples visites, le ménage, les repas, le lit est mauvais. Je m’épuise et je déprime malgré les visites quotidiennes de mon mari qui travaille et de quelques amies. Je n’attends pas la naissance, j’attends de sortir !
Un lundi matin, une sage femme que je n’avais jamais vue entre dans ma chambre et me dit « Bon, Madame, c’est aujourd’hui qu’on vous déclenche. » Ah. Très bien. Ok. Par chance, mon mari est en repos cette semaine. Malgré les médicaments, la cholestase ne baisse pas et les médecins préfèrent me déclencher tant que je ne fais pas de chute de tension et que je suis en forme. Et puis nous sommes à 35SA. Plus de risque pour les jumeaux.
Le processus de déclenchement a été lancé à 10h et je rentrerai dans la salle d’accouchement à 21h. Je m’en souviendrai longtemps, nous venions d’apprendre que Notre-Dame brûlait ! De l’accouchement je garde un bon souvenir. L’équipe est bienveillante et encourageante. Ma copine la péridurale fait des merveilles et j’accouche des deux pépères par voie basse sans aucun problème. Ils ont 20min d’écart.
La grossesse s’est très bien déroulée. J’ai eu la chance d’être en forme jusqu’au terme et je n’ai pas vu beaucoup de différence par rapport à la grossesse de mon aînée, si ce n’est le dernier mois pendant lequel les bébés pesaient vraiment plus lourd.
En revanche, j’ai dû faire le deuil d’un accouchement que je souhaitais naturel et physiologique depuis longtemps (les conditions pour le permettre dans le cadre d’une grossesse gémellaire sont rarement réunies). Accepter de rentrer dans un suivi de grossesse hyper médicalisé m’a également pris du temps : Mes jumelles étant monozygotes bi-amniotiques (vraies jumelles). Les risques étaient plus importants et j’avais des échographies tous les 15 jours. Le 1er rendez-vous pendant lequel on m’a expliqué tous les risques de la grossesse m’a fait l’effet d’une douche froide… J’ai donc pris soin de choisir les bons lieux et outils et de m’entourer des bonnes personnes pour vivre aussi sereinement et « naturellement » que possible cette grossesse.
Je n’ai pas eu mes deux enfants avec moi immédiatement. Grégoire a été emmené d’urgence 20min après sa naissance en service de néonatologie pour détresse respiratoire. Il y passera 4 jours, 3 étages au dessus de moi et son frère.
Je n’ai pas pu profiter des premiers instants avec Wandrille dans les bras car ma tête était avec son frère 3 étages au dessus. Ne pouvant pas m’‘y rendre autant que je le voulais à cause des soins de Wandrille et de mon suivi., je me suis sentie déchirée dès les premières heures. Quand Grégoire nous a enfin rejoint, cela faisait 4 jours que j’étais maman de jumeaux mais je crois que je ne l’avais pas encore réalisé.
Nous sommes sortis de la maternité au bout de 8 jours. Je considère « mes premiers jours » comme débutant à notre retour à la maison. Ils ont été très rudes. Wandrille pesait 2Kg et Grégoire 2kg900, mais c’est tout de même des petits poids. Nous voilà embarqués pour 16 biberons par 24h. Mon mari ne pouvant pas poser ses congés dans l’immédiat, j’ai donc dû m’occuper seule des enfants. Après un mois à l’hôpital, j’avais envie d’être tranquille chez moi avec ma « nouvelle famille », et ce fut mon erreur. Clairement le premier mois, je dormais par tranche de 40min. Rarement plus car ils ont eu beaucoup de mal à se synchroniser. Ils pleuraient beaucoup à cause du RGO, et ils demandaient des bras que je n’avais pas la force de leur offrir. J’ai fini au bout de deux mois et demi chez mes parents épuisée. Et c’est grâce à eux que j’ai pu m’occuper sereinement des enfants et prendre le temps nécessaire pour reprendre des forces.
J’avais au départ très peur de confondre mes filles, donc j’avais prévu une couleur différente de vêtements pour chacune! Finalement la différence de gabarits à la naissance a facilité la tâche mais le bracelet de maternité est tout de même resté longtemps à leur cheville…!
Le rythme à la maternité était intense mais je m’étais fixé le challenge de mettre en place l’allaitement double avant la sortie. Ainsi, je me reposais autant que possible sur les puéricultrices pour m’y aider et pour gérer tout le reste, en limitant au maximum les visites.
Je n’ai pas allaité. Grégoire n’étant pas avec moi, j’aurais dû à la fois nourrir Wandrille et tirer mon lait… Je ne me sentais pas de le faire. Les biberons sont aussi le meilleur moyen de confier ses enfants pour se reposer.
Les biberons quand les enfants ne sont pas synchronisés, rien de bien compliqué évidement ! Mais l’objectif principal d’une maman de multiples, c’est justement de synchroniser les enfants afin de gagner le temps qui lui manque déjà cruellement pour se reposer, profiter et faire tourner la maison! Mon astuce : J’installe la tête des garçons dans le creux de chaque cuisse et hop un biberon dans chaque main! Faire faire le rot est un peu acrobatique mais je dois avouer qu’on devient assez débrouillarde. Etre maman de jumeaux, c’est l’école du système D !
La diversification, c’est une autre histoire ! Chaque enfant est différent, et accepte plus ou moins bien le changement. Il faut s’armer de beaucoup, beaucoup de patience ! Grégoire est un gourmand et l’aventure petit pot s’est passée comme sur des roulettes! Wandrille est plus sensible et son biberon c’est son moment câlin. La première semaine s’est bien passée, puis refus catégorique! Patience donc. Et les astuces sont les mêmes que pour un enfant seul. Il faut juste composer pendant un moment avec deux manières différentes de donner le repas. Mais une fois que c’est instauré, les enfants apprennent la patience à leur tour, une cuillère chacun son tour.
J’ai souhaité allaiter mes jumelles dès le début. Je n’ai jamais considéré cela comme infaisable malgré les inquiétudes de mon entourage voire du personnel médical. Au contraire, avec l’expérience de mon aînée, je considère cela comme une facilité par rapport à la logistique des biberons !
En revanche, je me suis donné les moyens d’y parvenir: J’ai refait une séance de préparation à l’allaitement. Je me suis renseignée sur les spécificités d’un allaitement double (via fascicule de l’association Jumeaux et Plus, site de La Leche League, groupe Facebook « allaitement de jumeaux et plus »…) et je me suis exercée aux positions pour les co-tétées dès la maternité pour bénéficier de l’aide et des conseils du personnel. J’ai eu également la chance que les filles tètent très bien dès le début.
Une fois à la maison, j’ai utilisé un berceau cododo. J’ai allaité en position allongée la nuit pour me reposer au maximum, et en tandem la journée grâce à un super coussin d’allaitement double « My Brest Friend ».
4 mois après, je suis toujours en allaitement exclusif, j’alterne les tétées consécutives et simultanées. Cela permet d’avoir un moment spécifique avec chacune et aussi un temps toutes les trois!
Le terme gestion me fait bien rire car il implique l’idée d’organisation! Au début, plus que de la gestion, c’était de la survie. On passe d’un biberon à une couche et ça recommence et il faut jongler avec la vie qui continue. Se laver, se nourrir et entretenir la maison! Il ne faut pas refuser l’aide. Je le dis plus haut, mon erreur a été de vouloir me retrouver en famille directement alors que mon mari travaillait. Nous avons lu qu’il fallait en moyenne 27h par jour pour s’occuper de ses jumeaux de la même manière qu’un bébé normal. Des aides sont proposées par l’état et des associations pour le ménage et un peu de garde aussi. Mais c’est une bouffée d’oxygène trop rare et insuffisante. La présence d’une maman, d’une belle mère, d’une sœur, ou même d’une amie, c’est indispensable régulièrement selon moi au cours des 3 premiers mois.
Depuis que les enfants font leurs nuits, et cela coïncide avec le rythme commun. Je peux parler de gestion du quotidien. Mais je ne suis pas certaine qu’il diffère de beaucoup de celui d’une maman normale. Il s’agit d’être efficace mais aussi de profiter des ces petits bouts qui grandissent si vite!
L’astuce principale pour moi c’est de sortir tous les jours ! La phase critique est la fameuse fin d’après midi! Deux bébés râleurs, pleurnicheurs et demandeurs de bras c’est très vite épuisants pour les nerfs. Je rentre de balade à l’heure du bain et j’enchaîne sur dîner/dodo. Tout s’enchaîne vite et j’ai la force de le faire dans la bonne humeur…enfin souvent!
L’autre astuce, c’est le transat au moment du bain. C’est compliqué de donner le bain aux deux en même temps quand on est seule. J’en mets donc un dans son transat dans la salle de bain et on partage les rires et les éclaboussures tous les trois!
Pour résumer, quand on n’est pas une championne de l’organisation super zen, efficace et maman du tonnerre, il faut foncer vers la simplicité! Il faut aller au plus simple, pas forcément au mieux mais au plus simple.
Le quotidien est très intense donc il faut nécessairement s’organiser.
J’ai trouvé que le plus dur était le manque cruel de sommeil (bien que nous ayons eu de bonnes surprises avec des bébés faciles après une aînée B.A.B.I qui a fait ses nuits à 2 ans…). Et la nécessaire humilité pour accepter d’appeler au secours et de se faire aider.
J’ai suivi pas mal de recommandations de mamans de multiples et l’association « Jumeaux et Plus » m’a prodigué les meilleurs conseils qui soient.
Le fait de s’occuper des 2 bébés étant un travail à temps plein, nous avons essayé de déléguer tout le reste (entretien de la maison, courses, repas,…). La naissance des jumelles, c’est aussi un choc de simplification à domicile…!
La famille a pu venir donner un coup de main et accueillir l’aînée au retour de maternité pour nous permettre de prendre nos marques. J’ai également bénéficié d’un forfait de ménage grâce au contrat d’assistance lié à notre mutuelle avant de faire appel à l’ADMR pour l’aide à domicile à plus long terme.
J’ai eu également recours dans un 1er temps à des TISF qui ont un champ d’intervention très large pour m’aider à préparer les enfants le matin (mon mari partait très tôt) et aussi le mercredi pour garder les jumelles. Cela me permettait de prendre du temps avec mon aînée à l’extérieur.
J’ai ensuite choisi de faire plutôt appel à des baby-sitters car cela correspondait plus à mon besoin de flexibilité et de garde spécifiquement. Mon mari quant à lui aime planifier et préparer les repas et s’occuper des courses (oui je mesure ma chance !!). Il avait congelé pas mal de plats en avance pour n’avoir qu’à réchauffer les premiers mois… ce qui s’est révélé très utile.
J’avais aussi établi une liste de contacts à dégainer en urgence si besoin : garde de nuit, baby–sitters,… Une amie maman de jumeaux m’a également donné un excellent conseil quand on est au bord du gouffre: envoyer un texto d’appel au secours aux amies susceptibles de pouvoir venir pouponner pendant que l’on s’accorde une sieste.
Ma mémoire m’ayant lâchement abandonnée au cours de la grossesse et le manque cruel de sommeil, l’outil « Mon Petit Organisateur de Vie » est devenu mon meilleur allié: agenda, checklists, liste de courses… j’y note tout !! Il m’aide aussi à mettre en place des routines pour m’occuper des filles et ne rien oublier.
A 3 mois, j’ai senti que nous commencions à trouver notre rythme. Le temps et la rentrée à l’école de l’aînée aidant, et les nuits s’allongeant. Mais je m’aperçois également que chaque nouvelle étape de croissance demande de l’adaptation pour réorganiser sa logistique… Adepte des études de marché et comparatifs en tout genre, je passe pas mal de temps à étudier nos besoins puis à rechercher les meilleures solutions en outils et organisation en adéquation. Je pars du principe qu’une naissance gémellaire ne doit pas être un frein à notre quotidien… Cela constitue des petits challenges progressifs. Cela va de l’habillement des miss au lieu de les laisser en pyjama dans la journée, au recours à un porte bébé double pour continuer la randonnée en famille!
Les filles ont plutôt le même rythme. C’est un avantage mais aussi un inconvénient car la situation la plus difficile à gérer est lorsque les 2 pleurent en même temps! Lorsque je ne les allaite pas ensemble, je me sers beaucoup des transats Babybjorn ou de la poussette double. Cela me permet d’en faire patienter une en la berçant du pied pendant que j’allaite l’autre. Et lorsqu’elles sont désynchronisées la nuit, cela m’arrive de réveiller la 2e pour ne pas subir un double réveil. Ceci dit, j’ai la grande chance qu’elles sachent s’endormir seules surtout depuis qu’elles ont trouvé leur pouce.
Le lien particulier, nous avons pu le voir dès leurs premiers jours. Ils ont été séparés 30 minutes à peine après la naissance à cause d’un problème de respiration pour Grégoire. Pendant 2 jours Wandrille ne voulait dormir que dans des bras. J’ai demandé une après-midi de le mettre dans la couveuse de son frère. Miracle… le soir il dormait tranquillement seul dans son berceau. Je pense qu’il cherchait son frère !
Ensuite cela a été assez frustrant, rien pendant des mois! Comme si l’autre n’existait pas. Un des gros avantages que les parents de jumeaux envisagent, c’est cette complicité qui va occuper leurs bambins et les décharger un peu. Nous étions presque déçus! Mais depuis leurs 9 mois c’est l’amour fou ou vache. Ils s’interpellent et partent dans des fous rires que nous ne comprenons pas vraiment. Ils s’échangent les jouets, et la bave par la même occasion! Chez la nounou, hors de question de les faire dormir dans deux espaces différents. Apparemment cela déclenche des pleurs de panique. Je dois avouer que c’est assez magique de voir ces deux bonhommes grandir avec leur caractère bien propre et pourtant déjà prendre en considération l’autre. Lorsque Grégoire pleure parce qu’il a faim, Wandrille s’en moque. Mais si Grégoire se fait mal ou a eu peur, Wandrille va se mettre à pleurer avec lui. Je ne saurais pas l’expliquer. Mais c’est touchant!
J’ai encore peu de recul sur leur lien unique. Je pensais tout d’abord que les jumelles seraient très fusionnelles dès leur naissance. C’est vrai qu’elles pleuraient au début pour s’entendre et se rassurer lorsqu’elles n’étaient pas l’une à côté de l’autre, mais sinon, le fait qu’elles ne recherchent pas vraiment le contact de l’autre en apparence m’a déstabilisée dans un premier temps. Finalement, il semble que le lien de complicité apparaisse généralement plus tard…
Néanmoins, je sens qu’il y a un lien spécial entre elles par leur ressemblance et par le fait qu’elles se développent instinctivement de manière similaire. Elles ont trouvé chacune leur pouce à quelques jours d’écart ou se tournent du même côté pour s’endormir… Mais leur caractère est différent et correspond à ce que je pouvais ressentir dans mon ventre : L’une est plus tonique, dans l’action, et l’autre plus dans l’observation! J’ai hâte de voir comment elles vont évoluer…
Ma plus grande préoccupation concernait la place de Colombe, notre aînée. J’ai eu peur qu’elle se sente à l’écart de ce tandem. Abandonnée par nous qui allions être très accaparés par les nourrissons. Nous l’avions beaucoup préparée (le fait de confondre les bébés peut être également angoissant pour un enfant) mais l’arrivée de ses petites sœurs a tout de même été difficile pour elle. Elle pouvait être autant attentionnée qu’agressive, allant jusqu’à taper, mordre et griffer ses sœurs au visage dès que nous avions une seconde d’inattention… Ce fut le plus éprouvant pour nous, ce qui a requis un besoin particulier d’aide extérieure à cette période.
L’association Jumeaux et Plus nous a été d’une aide très précieuse : Outre les recommandations pour assurer une sécurité aux bébés (les couffins placés dans le parc à barreaux dont le fond avait été légèrement relevé), la présidente de la fédération locale nous a expliqué que Colombe cherchait à rentrer dans la bulle fusionnelle que j’avais avec les bébés. Il fallait ainsi favoriser le contact physique avec elle (câlins, petits massages, coiffure etc), lui octroyer des moments toute seule, et privilégier son langage d’amour spécifique. La solliciter pour le change ou d’autres tâches avec ses sœurs a été très bénéfique également.
La question la plus fréquente est « Ce sont des jumeaux ?? » suivie de près par « Filles ? Garçons ? ». Pour faire finement, certaines personnes me demandent l’âge… souvent suivi d’un petit « Je me disais bien que c’était des jumeaux! »
Mais plus sérieusement, on nous pose souvent la question du lien particulier entre eux. Ça intrigue les gens et je peux comprendre! Nous sommes les premiers curieux avec mon mari. On nous demande aussi pas mal comment nous avons fait pour choisir les prénoms. Nous savions déjà qui serait qui! Wandrille était tout calme et toujours coopératif pendant les échographies et Grégoire déjà un gros glouton et très dynamique! Nous trouvions que cela collait avec les personnalités.
La question qu’on me pose assez régulièrement et qui me met mal à l’aise, c’est la question de savoir si j’en aime un plus que l’autre. Evidemment que non!! En revanche, je les aime différemment, comme toute maman qui a plusieurs enfants. J’ai simplement dû apprendre à aimer deux individualités en même temps, quand une maman « normale » fait une rencontre après l’autre. Je trouve cette question blessante car découvrir la maternité avec des multiples n’a rien d’évident! Il y a tellement de fatigue, de questions, qu’on n‘a pas toujours le temps de réaliser, de s’émerveiller ou même de donner tout le temps qu’on voudrait à chaque bébé… Alors remettre en cause cet amour, c’est terrible, même si la question n’est pas posée pour blesser.
– « Ce sont des vrais ou des faux ? » (des vrais bien vivants, je vous jure ils ne sont pas en plastique !)
– « c’est naturel ? » (palme de la délicatesse)
– « Qui est qui ? » (Du coup j’ai fait faire un petit bracelet en gros grain avec leur prénom brodé dessus et de couleur différente, comme cela tout le monde s’y retrouve, même l’aînée qui ne sait pas lire !)
Le phénomène gémellaire fascine. Il n’est pas rare d’être abordée dans la rue et je me prête volontiers à la discussion sur le sujet… Mais en tant que mère louve avec mes bébés, j’ai vite camouflé ma progéniture sous une double capote dans la poussette pour éviter qu’ils ne soient trop exposés… Cela n’arrête pourtant pas certain(e)s inconnu(e)s qui, poussés par une curiosité débordante, commencent à enlever toutes les protections pour voir s’ils se ressemblent, sans même avoir demandé !! Gare alors à maman louve qui sort ses griffes…!
Un mot d’enfant: une petite fille de ma résidence demande un jour à son papa dans le creux de l’oreille si j’étais enceinte. Le papa me transmet la question et je réponds à la petite fille que oui, j’attends même deux bébés. Réponse immédiate « Ah d’accord. Je n’étais pas sûre parce que normalement un ventre de femme enceinte c’est rond c’est joli. » Oui…ce n’est pas super sexy une femme enceinte de jumeaux! J’avais un côté du ventre plus gros que l’autre suivant la position que Grégoire adoptait ! J’étais donc un peu difforme. Mais on s’y fait !
Je vais encore en rajouter une couche mais c’est si important! Il faut que les jeunes mamans de jumeaux se fassent aider et acceptent toute l’aide qu’on voudra bien leur donner (et même plusieurs mois après quand le rythme devient soutenable). Le lieu ne se prêtait pas à raconter en détail mon burn-out mais j’ai pleuré en me souvenant de ces premiers mois pour répondre à ces questions. Je me suis souvenue de la fatigue terrible et pesante, de l’angoisse à chaque fois que je me couchais, de la culpabilité de ne pas aimer être mère, de l’impuissance de mon mari face à mes crises de larmes! Il faut se reposer pour découvrir sereinement sa maternité.
Au delà de ça, il faut ajouter qu’avoir des jumeaux, c’est une sacrée aventure ! Comme toute aventure, il y a les galères mais il y a surtout les souvenirs et les leçons qu’on en tire. Bonne grosse leçon de lâcher prise pour moi et la conviction encore plus forte que le père de mes enfants est l’homme de ma vie. Et puis c’est la vie, donc il faut en profiter!
Pour la petite blague, je suis très monotâche (impossible de soutenir une discussion en coupant des tomates!) Mais heureusement mon mari est multitâches lui! Le comble pour une maman… Alors pour une maman de jumeaux, no comment !! Et pourtant, la gestion du quotidien ces derniers mois m’a amenée à me transformer en véritable femme-orchestre. Il n’est pas rare que je déjeune d’une main en aidant mon aînée de l’autre pendant que j’allaite une jumelle et que je berce du pied la seconde dans son transat !
Oh que non !! Je les aime mes affreux, et aujourd’hui c’est un plaisir de les voir grandir et devenir des grosses canailles! Nous formons une famille et nous passons de joyeux moments. Mais je n’ai pas découvert la maternité sereinement. J’ai des blessures à soigner et mon mari aussi. Envisager numéro 3 c’est la peur d’avoir 3…et 4! Wandrille et Grégoire sont des vrais jumeaux, c’est donc le hasard de la vie, mais il y a une forte génétique de faux jumeaux dans nos deux familles. Ils sont encore petits et rien ne presse, mais à l’heure actuelle nous ne l’envisageons pas, même à moyen terme.
Et si la question était : et si c’était à refaire…et bien dilemme! Je dirais non. Si j’avais le choix je ne le referais pas. Mais en même temps…je ne sais pas lequel choisir tellement je les aime!
Plutôt deux fois qu’une, parole de maman de jumelles !
Même en étant encore dans une phase de rythme intense, je mesure ma chance de vivre cette expérience peu commune. Les témoignages de mamans de multiples émerveillées par le lien grandissant entre leurs enfants sont encourageants…
Les jumeaux, c’est 2 fois moins de sommeil et de tranquillité, mais 2 fois plus de joie et d’amour!
Propos recueillis par Alice de Champs
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