Toi, Maman d’enfant différent, malade ou handicapé, laisse-moi te dire…
Je sais que tu n’en veux pas, qu’elle te gêne… Tu ne crois pas faire quelque chose d’extraordinaire et tu penses que nous en ferions autant si nous étions confrontées aux mêmes épreuves… Possible, mais cela n’enlève rien à ton courage.
Tu fais face : aux multiples rendez-vous médicaux, aux méandres complexes, infinis et si rigides de l’administration (je pense à ces dossiers de 75 pages à envoyer régulièrement à la MDPH pour leur signifier que ton enfant est toujours malade !), à la souffrance de ton enfant, à l’angoisse du lendemain, à la fatigue immense, à l’incompréhension de ton entourage, aux regards des autres, parfois si culpabilisants, à la solitude…
Tu te bats comme une lionne. Tu es sur tous les fronts. Tu ne renonces jamais. Et plus encore, tu souris à ton enfant, tu lui montres la beauté de la vie, tu fais tout pour qu’il soit heureux… Et il l’est, grâce à toi ! Tu es son rocher, son épaule…
Pour les mêmes raisons que celles qui font que je t’admire : pour tant de souffrances que ton cœur abrite, les tiennes et celles de ton enfant ; pour cette maladie que tu combats, souvent sans espoir de la vaincre ; pour cet argent que tu ne dépenseras pas en loisirs et qui te manque si souvent pour lutter ; pour ce temps que tu n’auras jamais pour toi ; pour cette solitude qui te pèse tant quand, parfois, ton mari te laisse tout gérer, s’il ne s’est pas enfui…
Tu fais la forte, et tu l’es, mais ça te coûte une telle énergie que tu pourrais fournir en électricité une ville comme Paris (c’est étonnant qu’on n’y ait jamais pensé ! Tiendrait-on une alternative aux énergies fossiles ?). Tu es une Mère courage, mais toi, qui te portera ? Qui te tiendra la main ? Tu n’as souvent personne auprès de qui pleurer : nous sommes éloignés de ton quotidien et tu ne veux pas inspirer la pitié !
D’ailleurs, tu refuses de t’appesantir sur ton sort. Tu craindrais trop de t’effondrer… Et qui tiendrait la barre après cela ? La maladie est devenue la norme. Tu navigues à vue dans la tempête. Tu es devenue une navigatrice expérimentée…
Pour ton courage qui me soutient moi aussi et qui m’apprend la vie.
Pour cet exemple que tu donnes et qui dépasses largement les frontières de ton foyer.
Pour cet amour qui te motive, qui te fait déplacer les montagnes et qui m’éclabousse de bonheur et de joie malgré tout ; qui me fait comprendre que tout est possible quand on aime…
Pour cette force que tu dégages.
Pour cette foi en la vie qui t’animes et qui m’apprend à ne pas baisser les bras dans les petits tracas du quotidien.
Pour cette peur qui me retient et qui creuse un précipice entre toi et moi : peur de la maladie, de l’inconnu, peur de te faire souffrir, de te déranger, d’être indiscrète, d’être maladroite… C’est avec les meilleures intentions du monde que, parfois, je te laisse seule, désespérément seule.
Pour mon égoïsme qui m’empêche d’être à tes côtés, ce manque de temps, ce manque d’entraide…
Pour mes jugements, mes condescendances, mes remarques désobligeantes, ma pitié…
Pour mes regards fuyants, mon absence de regard, tous ces regards mal ajustés qui font que je ne vois plus ton enfant, mais sa maladie, que je ne regarde plus la femme et l’amie que tu es, mais les problèmes de ta vie….
Pour toutes mes maladresses, pour ce manque d’amour qui m’empêche de trouver les mots, les gestes qui pourraient te faire du bien.
Je voudrais te prendre dans mes bras, que tu te sentes soutenue… je voudrais, si je ne tiens pas la barre à ta place, au moins être à tes côtés…
Je veux que tu puisses compter sur moi quand tu en as besoin… Je veux te tenir compagnie, t’écouter, essayer de te comprendre sans te juger, partager un café, te soulager si possible dans ton quotidien, te faire rire, te partager ma vie pour ne pas t’enfermer dans la tienne, te sourire, te parler d’un bon film, te prêter mon épaule pour te laisser pleurer, te consoler, t’encourager, t’écouter, t’admirer (parce que, quoi que tu en dises, tu en as besoin !), aimer ton enfant, le regarder grandir avec toi, lui sourire, lui parler, l’encourager, ne pas en avoir peur, aimer la vie à tes côtés, à ses côtés, et la regarder sous son meilleur jour.
Ose, toi aussi, me solliciter ! L’amitié, c’est une question de confiance réciproque !
Et pour cela, je vais reprendre les mots d’autres mamans dans le même cas que toi. J’espère qu’ils te feront du bien.
Tu es passée ou tu passeras, plus ou moins vite, par toutes les étapes du deuil, de l’incompréhension et la révolte à l’acceptation et au dépassement. Mais la maladie qui touche ton enfant et qui affecte toute la famille peut être vécue comme une grande souffrance ou comme un accélérateur de vie.
Ce n’est pas parce que ta vie est « extra-ordinaire » que tu n’as pas de vie. Elle est juste différente, plus intense, plus complexe, plus fatigante, mais aussi plus riche en émotions et en enseignements.
Tu goûtes plus intensément les petites joies, les petits progrès qui prennent une place importante. Et même si tu ressens plus intensément la douleur, tu apprends à relativiser les petits soucis du quotidien parce que l’important est ailleurs…
Tu découvres et tu découvriras de beaux gestes de réelle amitié ; de belles personnes qui se battent à tes côtés. Ton cœur s’ouvre en acceptant les mains tendues. Tu apprends la gratitude, le lâcher prise.
Certes, tu prends des coups, mais tu te renforces. Tu révèles tes talents. Tu prends confiance. Ton quotidien prend des tournants inattendus et positifs si tu sais profiter de l’occasion et si tu acceptes d’abandonner tes rêves pour te laisser bousculer par la vie. Tu prends des décisions que tu n’aurais pas osé prendre si tu n’y avais pas été obligée en quelque sorte…
Surtout, tu apprends et tu nous apprends la beauté et le sacré de la vie, quelle qu’elle soit. Le respect qu’on doit à chaque être humain. Tu réfléchis et tu nous fait réfléchir à ce qui fait la dignité de l’être humain et son bonheur.
Tu fais de ton mieux, jour après jour, avec les ressources dont tu disposes. C’est de l’amour à l’état pur ! Et chaque jour, tu progresses. Ne perds pas courage et n’aie pas peur ! La Vie te réserve encore de belles surprises ! Fais lui confiance !