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Jolie rencontre chez MAMAN VOGUE avec Alix, mariée, maman, malade (souffrant d’une cardiomyopathie) et désormais écrivaine !
A l’occasion de la sortie de son livre Cœur à l’ouvrage, Alix nous offre une belle leçon de vie. L’autofiction superbement écrite d’une femme face à la maladie, des tranches de vie parfois douloureuses, souvent drôles, toujours tendres, partagées cœur à cœur avec le lecteur. Un témoignage édifiant.
J’ai 40 ans, je suis mariée, j’ai trois enfants âgés aujourd’hui de 8, 6 et 4 ans. Et je suis une maman malade !
Il y a 4 ans, j’ai découvert que je souffrais d’une maladie du muscle cardiaque, une cardiomyopathie. C’est une maladie que je ne connaissais pas, et il m’a fallu du temps pour comprendre et pour accepter ce qui se passait !
J’étais épuisée, depuis plusieurs semaines. Mes enfants étaient très jeunes (5 ans, 3 ans et 8 mois). J’avais choisi de prendre un congé parental depuis la naissance de mon deuxième enfant. Je me demandais si je n’étais pas en train de vivre une dépression du post partum. Je cherchais à en faire moins, à me reposer, en vain.
Une nuit, je me suis mise à tousser, j’avais du mal à reprendre ma respiration. Je suis allée voir le médecin. Je pensais que j’avais une bronchite. Il m’a envoyée immédiatement chez le cardiologue : j’étais en effet en train de faire une grave crise d’insuffisance cardiaque, j’ai frôlé la mort.
Oui, et non : il y avait un mot sur ce que je vivais ! Le médecin m’a dit « Ce n’est pas une vue de votre esprit. Comment avez-vous fait pour tenir jusque là ? ».
Enfin, je me suis accordée le droit de « mettre sur off », de me reposer ! J’ai passé plusieurs semaines dans mon lit, et quelques jours à l’hôpital. C’est plus mon entourage que moi qui a souffert de mon état !
Il faudrait le leur demander…
La maladie pulvérise tout, pour la personne malade comme pour son entourage. Il y a une vraie violence. Tout seul, on ne s’en sort pas.
Nous avons demandé de l’aide. Pas évident… Mais nous avons eu la chance de trouver les bonnes personnes.
Pour les enfants, nous avons essayé de ne pas leur cacher les choses, de trouver des mots adaptés. Nous étions persuadés qu’ils avaient tout compris, tout perçu : les enfants ont des « antennes » ; ils sont tellement intuitifs ! Ils n’avaient pas de mots en revanche pour nommer ce qui se passait. Notre rôle de parents était de leur donner ces mots.
Les enfants m’ont émerveillée : le cœur pour un enfant, c’est avant tout l’amour. Et l’un des petits m’a demandé si mon amour pour eux était malade. Alors j’ai pu les rassurer, leur dire que même si j’étais très fatiguée, ça n’était pas de leur faute et que mon amour pour eux, lui, n’était pas du tout malade, qu’il ne cessait pas de grandir.
Je pense que quelque chose a changé ce jour-là : ce sont les enfants qui m’ont aidée à dire ce qu’ils avaient besoin d’entendre. Je n’étais plus la mère toute puissante qui sait tout.
Je ne suis plus dans un état critique, mais ma cardiomyopathie n’est pas guérie ; elle le sera peut être un jour, ou peut être pas. Une maladie qui ne guérit pas s’appelle un handicap. Le mien est invisible. Je prends pas mal de médicaments, je suis toujours fatiguée, et j’ai dû « réinventer ma vie » !
Mon mari, mes enfants et moi, nous apprenons à vivre avec la maladie.
J’ai dû faire le deuil de mon ambition d’être une super maman ultra performante, une femme parfaitement séduisante et toujours disponible. Accepter ma fragilité.
Lorsque j’ai découvert à quel point les personnes fragiles me consolent, m’apaisent, j’ai compris que cette fragilité n’était pas un obstacle, mais une source !
J’ai toujours aimé écrire. Je lis beaucoup. Comme je l’ai dit, la maladie a pulvérisé beaucoup de choses, mais le goût et l’envie d’écrire sont restés.
Avant d’être malade, je rêvais d’écrire un livre. Celui-ci a pris une forme inattendue : des fragments, plus ou moins longs, écrits lorsque je le pouvais. Des faits, rien que des faits. J’ai voulu écrire au plus près de la réalité.
Je pense que cette forme s’adapte en fait à ce qu’on vit quand on est malade : des moments minuscules qui en disent long, des émotions immenses, des larmes, de la poésie, et très souvent, des rires.
Des rires ?
Ah oui, on rit beaucoup, entre malades ! Le rire est une arme qui nous protège et nous permet de tenir bon. Surtout, l’expérience de la maladie m’apprend à savourer la vie.
Il me faut compléter ce que je vous ai dit : je suis une femme et une mère malade et aussi une maman, une femme, profondément heureuse.
« – Maman, ça veut dire quoi une cardiomyopathie dilatée ?
– C’est mon cœur qui a changé de forme.
– Ah bon ! Et il ressemble à quoi ?
– Je vais vous le dessiner.
– Ha ! on dirait une grosse courge. Et il fonctionne quand même, ton coeur ?
– Oui, bien sûr. Je suis bien soignée.
– Non mais je veux dire… pour aimer ? »
« J’aime la couleur des murs de ce bureau. Un bleu turquoise très lumineux qui éclaire la moquette grise où les pieds s’enfoncent, confortables. Le bureau est blanc et très simple, d’une forme arrondie qui me rend accueillante la femme assise en face de moi.
Je parle et elle m’écoute. Je viens la voir parce que je suis, encore une fois, enfermée dans une boîte dont je ne trouve pas l’issue : je suis malade, je suis mariée, j’ai trois enfants. Et j’ai un rôle à jouer dans ma famille… Pour eux, c’est là ma joie, je ne suis pas ma maladie. Je suis la femme qu’il aime. Je suis leur mère. Je veux prendre soin d’eux, les aimer.
Mais aujourd’hui, la maladie exige. Elle réclame elle aussi que je prenne soin d’elle. Que je lui donne du temps, pour faire du sport, me reposer. Que je ne repousse pas trop loin les limites de ma résistance.
Ce que je donne à mon mari, à mes enfants, est-ce à la maladie qu’il faudrait le donner ? Ce que je donne à la maladie, est-ce à mon mari, à mes enfants, que je le dois ?
Je suis enfermée dans ma boîte.
La femme assise en face de moi m’écoute avec ses yeux.
Elle me dit : « Oui, c’est difficile. » Puis me fait quatre propositions :
©Éditions Quasar, 2017, Paris
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