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Réconcilier maternité et travail : entretien avec Marine de Poncins

 
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Marine de Poncins a trois enfants. Après une grande école de commerce, elle a fondé en 2016 un cabinet de conseil nommé « Les Prodigieuses ». L’objectif est de réconcilier le monde du travail avec la grossesse et la maternité. En 2019, elle publie « Co-naissance : Enceinte, harmonieuse et active ». Maman Vogue l’a rencontrée !

Pouvez-vous nous expliquer cette notion de « co-naissance » ?

C’est l’idée qu’en devenant mère, la femme naît, en même temps que l’enfant. La grossesse et la maternité sont des périodes extraordinaires où la femme prend conscience de son identité. Elle découvre son génie propre et sa force. C’est aussi un moment propice à l’intériorité et à l’ancrage dans le réel.

Comment aidez-vous les entreprises à intégrer grossesse et maternité ?

Malheureusement, les entreprises, pour la plupart, soit n’en ont rien à faire, soit englobent cette problématique derrière le terme de « parentalité ». Bien sûr ce terme est trop vague pour prendre en compte la spécificité féminine. Mon objectif, avec mes séminaires et mes accompagnements, est de changer le regard. La maternité au travail est vue comme un problème et un frein, j’essaye de la transformer en force et en tremplin.

Quels conseils donnez-vous à une jeune femme qui a peur que sa maternité gêne sa carrière ?

J’essaye toujours de rappeler que la maternité est en soi et d’abord une joie. Bien sûr, des maux et des difficultés peuvent l’accompagner, mais la joie ne doit pas être oubliée. Il faut aussi accepter l’imprévisible : on ne maîtrise pas ce qui peut arriver dans une grossesse. Ma mission est réussie quand une jeune femme stressée, dans la maitrise, repart apaisée. L’objectif pour ces jeunes femmes est d’habiter leur grossesse. Car le stress, le culte de la performance et de la légitimé peuvent faire passer complètement à côté de ce qu’on vit pendant la grossesse. Je les accompagne aussi au retour du congé maternité et à la reprise du travail. On fait alors une relecture de la grossesse, encore une fois pour vivre pleinement ce moment. Finalement il s’agit toujours d’accueillir : accueillir ce nouvel être qu’est le bébé mais aussi s’accueillir soi-même nouvelle !

Quels conseils donnez-vous à un chef d’entreprise pour mieux appréhender grossesse et maternité au travail ?

Souvent, les chefs d’entreprise que j’accompagne sont eux-mêmes pères et sinon, ils sont proches de femmes (sœurs, amies etc) qui sont mères. Je les fais partir de ces situations connues, familières, pour les transposer aux collègues enceinte ou mères. Cela les aide à mettre du sens dans les changements qui s’opèrent (changements physiques, psychologiques, organisationnels…). Il s’agit de déculpabiliser les pensées spontanées de type « mince elle tombe enceinte au mauvais moment pour la boîte ». On a le droit de le penser, en revanche on doit trier et adapter parce qu’on arrive à comprendre en face, par l’effet miroir, ce que l’autre vit.

Est-il vrai que les managers femmes sont plus dures avec leurs collègues femmes ?

Malheureusement cela arrive, oui, j’en ai accompagné. Il y a une génération de femmes frustrées mais convaincues d’être pleinement épanouies au travail, qui finissent par nier la dimension intérieure et spécifiquement féminine de leur identité. Elles ont sacrifié la maternité et la vie familiale sur l’autel de la performance et de la carrière et n’arrivent pas à accepter de croiser des femmes, des mères, qui, elles, veulent concilier vie professionnelle et vie familiale. Elles peuvent donc avoir la tentation d’écraser, de punir, quand elles en ont le pouvoir. Je me souviens de la grande patronne d’une grosse boîte, qui s’est présentée en me disant « j’ai deux enfants : le premier dont je me suis peu occupée, le second que je n’ai jamais eu ». Elle avait sacrifié sa vie personnelle pour sa carrière et avait eu énormément de mal, dans son parcours, à supporter les annonces de grossesse et les aménagements de collègues. Après des années de cet écartèlement, elle avait compris la souffrance qui en était à l’origine et se faisait un devoir, aujourd’hui, de soutenir les femmes dans leurs choix.

Vous intervenez aussi dans les lycées, que constatez-vous chez les jeunes générations ?

Je rencontre une nouvelle génération de jeunes filles souvent en révolte : contre leur corps, contre les attentes de la société, contre le monde qui court à sa perte. La société leur demande de faire leurs preuves, de ne surtout pas avoir d’enfant au début de leur carrière au risque d’être blacklistées des grands groupes. Mais peut-être faudrait-il inverser l’ordre des priorités ? Soutenir la maternité jeune, quand la femme est pleine d’énergie, pour se concentrer ensuite sur sa carrière ?

Au terme de « féminisme », vous préférez celui de « féminologie », pourquoi ?

La limite du féminisme, à mes yeux, est l’idée d’une lutte en réponse à un sentiment d’infériorité. Ce combat devient une lutte inconsciente contre l’identité de la femme pour acquérir des droits. Le vrai combat à mener, pour moi, est celui de la connaissance de la femme. C’est à ça que renvoie le mot « féminologie », forgée par Antoinette Fouques. Je suis toujours frappée de voir comme les femmes, aujourd’hui, se connaissent peu ! Souvent, c’est en tombant enceinte que la femme se connecte pour la première fois à son corps – d’où l’idée de la « co-naissance », de la naissance à soi. Cette connaissance de la femme par elle-même est le vrai défi à relever aujourd’hui et demain !

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