Alors ça c’est trop drôle ! Une journée mondiale du coloriage ? Je n’avais jamais entendu parler de ça !!! C’est incroyable, il existe une journée pour tout maintenant ! A quand la journée des orteils ? Encore que ce serait génial de se mettre un vernis différent sur chaque ongle de pied pour célébrer cette journée, et en profiter pour se rappeler que bien qu’ils soient petits et parfois un peu tordus, on serait incapable de se déplacer correctement sans eux ! Quand tu te cognes le petit doigt de pied au coin d’une porte, que tu te retiens (ou pas!) de hurler tous les gros mots que tu connais, et qu’il met 3 semaines à guérir, là tu comprends bien l’importance de cet orteil et l’intérêt de ne pas mépriser une partie du corps aussi petite soit-elle.
Pour être honnête, s’il n’existait pas de journée du coloriage, jamais je me serais autant questionnée sur les coloriages eux-mêmes. A priori il s’agit du truc le plus banal du monde. Tout le monde commence sa vie d’enfant avec des crayons dans les mains. Sûrement que vos enfants se contentent des jolis cahiers de coloriages que vous mettez à leur disposition, mais les miens ont tous eu besoin de tester le coloriage de canapé, de dessus de lit, des radiateurs, des murs etc…
C’est incroyable comme on peut s’extasier devant leurs œuvres quand elles sont réalisées à l’endroit propice et comme on peut péter un câble et détester leurs œuvres si elles sont nées sur le mauvais support. Ils ne doivent pas toujours comprendre nos réactions ! « Maman, tu as tellement aimé comment j’ai colorié le lapin de mon cahier, je pensais que tu serais folle de joie en voyant que j’avais colorié le joli lapin blanc sur ton pull. Il était tout triste avant, maintenant il est content !«
Comme pour tout dans la vie, il va falloir expliquer à nos enfants, et donc comprendre pour nous-mêmes parents (oui pour expliquer un truc, il faut d’abord l’avoir compris !) pourquoi certains supports sont parfaitement adaptés à leur passion de colorier, et pourquoi d’autres sont préférés vierges et qu’on se voit dans l’obligation de refuser leur proposition de les recouvrir de couleurs vives.
On considère que le coloriage n’est que la simple action de mettre de la couleur sur un support ! Pourtant, j’ai l’impression qu’il existe depuis toujours et dans toutes les civilisations, non ? Lascaux, c’est bien du coloriage sur murs de grotte ? Cependant, j’ai appris que les premiers cahiers de coloriages ont vu le jour aux Etats-Unis au 18ème siècle. Ils s’appelaient « livres à peindre ou a colorier » et faisaient partie d’un mouvement plus large appelé « démocratisation de l’art » . L’objectif était d’offrir une éducation artistique, d’améliorer la compréhension abstraite du réel, de développer les capacités cognitives et l’habileté, ce qui serait utile pour trouver un travail. Au début c’était surtout pour des cahiers pour peindre, puis vers 1930 lorsque les crayons devinrent d’un usage courant, sont arrivés les cahiers à colorier.
Vous vous êtes déjà demandé quel était le but d’un coloriage ? Est ce que c’est juste pour s’occuper ? Il faut passer le temps, tiens, je vais colorier quelque chose…
Si vous saviez le nombre de professions qui utilisent le coloriage comme apprentissages, comme supports pour obtenir des informations. On imagine que le coloriage est un jeu d’enfant, pourtant dans la maison de retraite dans laquelle je travaille, le coloriage est vu comme thérapeutique. La capacité d’un coloriage à cadrer et à apaiser est impressionnante. Certains coloriages sont même pensés dans le but d’apaiser. Qu’en dites-vous? Si on pouvait permettre à un patient, dans la mesure du possible, de se détendre en coloriant plutôt qu’avec un comprimé. J’ai plusieurs fois été témoin d’une intervention de l’art-thérapeute (ou psychologue ou médecin) qui en quelques coup de crayons et de sourires a réussi à apaiser quelqu’un d’agité. Une fois concentré sur sa feuille, un objectif, un seul: remplir chaque petit espace de ce dessin pour qu’il n’y ait plus de blanc. Une mission qui semble détendre l’artiste qui l’accepte.
Et nos petits choux ? Est-il possible qu’après une journée stressante et avant une soirée remplie, un petit temps assis ensemble à colorier soit le meilleurs des apaisements ? Ensemble c’est encore mieux. Parfois on n’a pas l’énergie pour parler ou faire une activité coûteuse, mais juste apporter ensemble des couleurs à un dessins fade. Voilà une mission qui canalise, qui calme, qui fédère.
Qu’on le veuille ou non, la manière dont on colorie raconte beaucoup de qui on est. Si je regarde la manière dont mes enfants apportent des couleurs à leurs coloriages, je peux obtenir tellement d’informations sur leur tempéraments, leur manières de voir la vie.
Même pour moi, la manière dont je colorie me révèle beaucoup sur ma personnalité.
Faites-vous la différence entre un enfant qui va respecter à 100% les limites du dessin qu’il colorie et un autre enfant qui semble ignorer complètement ces limites?! Alors, oui, il peut s’agir de maladresse ou de difficultés et non d’un réel désir de dépasser les limites. Mais pas seulement. Pour certains les limites sont faites pour être repoussées, n’est-ce pas Christophe (Colomb) ? Et j’imagine que dans bien des domaines vos enfants testent en permanence les limites, non? Ah, non? C’est juste les miens? Ok !
J’aime tellement tout ce qu’on découvre de leurs tempéraments à travers les coloriages ! Pour certains enfants tout doit être réaliste: « Mais maman ! Un chat ne peut pas être rose !! Un éléphant ne peut pas être vert !! »
Et les arbres multicolores, on en parle ? Pour l’un de mes enfants, les arbres sont systématiquement multicolores. J’étais tentée plus d’une fois de dire que c’était n’importe quoi un arbre multicolore. Puis j’ai choisi de laisser cette situation m’enseigner sur sa personnalité plutôt que de lui imposer ma vision du monde. Je suis certaine que mon enfant voit bien les arbres vert et marron, l’ophtalmo est formel ! Mais dans l’art, ce n’est pas toujours le réalisme qu’on recherche, mais le merveilleux, l’émotion, l’imaginaire. Une œuvre raconte toujours la vie intérieure de son auteur. A nous d’être à l’écoute.
Priscille – encourageuse sur le compte Instagram dépassée mais heureuse