Injonctions éducatives de toutes parts, écartelement entre fermeté et bienveillance, pression et culpabilité… Les parents n’ont jamais été si perdus qu’aujourd’hui ! Est-ce possible de revenir à une forme de bon sens et d’intuition éducative ? Une méthode est-elle plus efficace qu’une autre ? Comment élever des enfants heureux et libres qui sachent en même temps respecter des règles de vie commune ? Que penser de la punition ?
Marie Chetrit, autrice et docteure en sciences, préface l’ouvrage du professeur Alan Kazdin « Eduquer sans s’épuiser » sous-titré « Les outils pour une éducation positive qui pose des limites ». Elle a accepté de répondre à nos questions et nous apporte son éclairage sur la parentalité et la crise de l’éducation.
Je pense que les parents d’aujourd’hui font face à beaucoup d’injonctions éducatives et portent beaucoup de responsabilités sur leurs épaules. On leur demande de garantir non seulement la santé et le bon développement de leur enfant, mais également son épanouissement psychologique et sa réussite professionnelle ultérieure. S’ajoute à cela le fait qu’une grossesse aujourd’hui est majoritairement choisie et réfléchie. Un enfant désiré et voulu génère un sentiment de responsabilité très important. Les parents sont d’autant plus perméables aux injonctions éducatives qui ont fleuri ces dernières années dans les médias, les livres ou les réseaux sociaux. Enfin, la manière dont l’éducation positive a été présentée et véhiculée en France a été assez culpabilisante. Les discours visaient à diminuer la prévalence de la maltraitance infantile dans la société. Mais les parents qui ont reçu ces discours ne sont pas les parents maltraitants ! Ce sont les parents déjà très concernés par le bien-être de leur enfant. Conclusion : malaise, culpabilité face au désir de faire toujours mieux, et parents un peu perdus !
Non ! Il ne faut pas choisir mais prendre ce qu’il y a de bon dans les deux ! Un enfant a toujours besoin d’un cadre éducatif. Donc la véritable éducation positive suppose un cadre. Elle n’est pas le laxisme et l’absence de réaction parentale ! Mais ce cadre ne doit pas être d’une rigidité absolue. Il faut avoir suffisamment de souplesse parentale, notamment sur des aspects qui ne sont pas importants (l’habillement par exemple). C’est l’une des nouveautés par rapport à la fermeté des générations précédentes. L’éducation dite positive met l’accent sur l’écoute de l’enfant et la prise en compte de son immaturité. On peut donc concilier le cadre éducatif indispensable avec une relation affective et une complicité plus poussées que ce qui était la norme pour nos parents ou grands-parents. Le tout est d’avoir conscience que les parents doivent apporter amour, affection, attention, ainsi qu’un cadre qui permette de grandir de manière harmonieuse et de vivre selon les exigences de la société. Je crois que quand un enfant a tout ça, on peut dire qu’on a réussi !
La grande nouveauté de cette méthode c’est d’abord d’être écrite par un professeur de psychologie qui a fondé un centre de parentalité où il a reçu des milliers de familles. Ce n’est pas la même chose que beaucoup d’influenceurs ou coachs en parentalité ! Alan Kazdin a donc une très grande expérience dans ce domaine et avec des publics très différents. Il a en effet commencé avec des enfants atteints de gros troubles du comportement ou venant de milieux sociaux très défavorisés. Puis il a travaillé avec des familles plus classiques, où les parents avaient simplement besoin d’aide pour que la vie quotidienne soit plus apaisée. Le professeur Kazdin a donc une vision de clinicien à grande échelle de familles très diverses.
L’atout majeur de la méthode Kazdin est d’être extrêmement concrète. Que faire ? Comment le faire ? Le professeur détaille par exemple la manière d’agir sur les antécédents, c’est-à-dire les outils qui permettent de favoriser la survenue d’un bon comportement chez l’enfant. Ou encore, les manières d’encourager l’enfant à bien agir. Toujours avec des cas concrets et des exemples dans lesquels les familles peuvent se retrouver facilement (un enfant qui répond « non » à tout, un enfant qui ne veut pas faire ses devoirs etc). La méthodologie est expliquée étape par étape, pour diminuer ces comportements agaçants du quotidien.
S’écouter comme parent, répondre aux besoins fondamentaux de son enfant avec attention et affection, être ferme sur certaines règles et s’assouplir sur d’autres, renforcer et valoriser tout ce qui est positif dans le comportement de son enfant… Quelques lignes de route simples et efficaces à rappeler aux parents d’aujourd’hui !